Jour de pluie ; il n'y en a pas d'autres dans ce coin de terre . Était-ce l'automne ,
était-ce au printemps ? . Il pleuvait . Nous attaquions la cote 137 baïonnette au canon .
C'était un matin . La préparation de l'artillerie - la nôtre - avait occupé une bonne heure
de l'aube . Je pataugeai derrière le capitaine puis tombai à plat ventre dans la boue
devant les chevaux de frise de ces cochons d'en face . On les avait écrabouillé avant-hier ,
on avait remis ça hier et encore aujourd'hui et leurs barbelés avaient un air neuf , comme
tout juste livrés par un quincailler . Comme je saisissais ma pince , je vis que mon voisin ,
pareillement enfoncé dans le bourbier sous la mitraille et les tirs de mortier , tenait avec
délicatesse entre le pouce et l'index une pointe de cet horrible fil . Il la regardait d'un oeil
fixe , la bouche bée . Il était immobile et la boue maculait son visage ; je crus qu'il était
mort jusqu'à ce qu'il me frappe l'épaule tandis que je m'escrimais à couper cette saloperie
de ronce . C'était Martial .
- Moi . Je hurlai : "Qu'est-ce que tu fous , Martial !? … coupe avant qu'ils nous cisaillent !
Nom de Dieu , Martial !!"
- Lui , me recouvrant pratiquement et beuglant à mon oreille : "Tu as vu ces pointes ? …
regarde-les ! …"
- Moi : "Coupe , Martial ! … coupe ! …"
- Lui : "C'est merveilleux !"
- Moi : "………….?…………."
- Lui : "On dirait de l'aubépine !"
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