mercredi 27 avril 2016

KRANT 60 . BYZANCE

    Krant détestait les mers intérieures . C'était un homme d'océans . Cependant , de
ces bosphores où nous propulsaient nos obligations commerciales et les hélices du
Kritik , il en est un que Krant franchissait avec plaisir : celui de Constantinople . A
son point le plus mince , ce détroit mesure à peine 2200 pieds et la circulation y est
affolante . Nous frôlions dans ce passage les palais en bois du Sultan et il semblait
qu'on allait toucher les lanternes de façade . Krant engageait le Kritik dans Haliç ,
la Corne d'Or , et nous abordions à Fener . Le capitaine m'ordonnait de mettre ma
tenue de grande sortie et lui-même apparaissait à la porte de sa cabine plus lustré
encore qu'à l'habitude .

- "Nous allons à terre"

    Monsieur Lee nous accompagnait et revêtait pour l'occasion dont il semblait
connaître le texte littéral son costume de mandarin . Nous faisions quelques pas dans
une rue perpendiculaire au quai où le Kritik avait ses amarres et nous trouvions à la
porte sculptée d'une luxueuse résidence . Monsieur Lee me glissait à l'oreille que nous
étions chez les Cantacuzène , vieille famille byzantine qui , jadis , avait dirigé les Pro-
vinces ottomanes de Moldavie et de Valachie , Provinces que j'aurais été incapable de
situer sur une carte . Krant tombait dans les bras de messieurs en redingote et baisait
les mains manucurées des dames . Je cachais les miennes dans mes poches car y sub-
sistaient des regrettables traces de cambouis . Aux plafonds d'or , brillaient des lustres
de tudieu mille bougies !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire