Nous n'avons pas de lave-vaisselle . Je fais la plonge . Elle peint . C'est son métier .
Moi , je suis à la retraite .
- Gaby : "Est-ce que je peux te demander quelque chose ?"
Je me retourne en gardant les mains dans la mousse . Elle est de dos ; elle fait face à
l'un des quatre murs de la salle à manger qu'elle a à moitié couvert d'arabesques de
peinture acrylique . Ces murs , hier à sa demande , je les ai badigeonnés de blanc . Elle a ,
à côté d'elle , un chariot avec ses pinceaux , ses tubes , un plateau en plastique sur lequel
elle mélange les couleurs . Elle porte un tablier gris trop grand pour elle dont l'ourlet frôle
la bâche qu'elle a déployée sur le plancher .
- Moi : "Je t'écoute"
Mais la question ne vient pas . Je sais qu'elle tourne dans sa tête en même temps
qu'elle hésite entre un trait de rouge ici , ou là … ou …
Je n'aime pas la tournure suspendue de ses questions . J'attends . Quelque chose se
vide en moi : ou quelque chose plane ou peut-être l'air s'est-il raréfié . Je reprends mon
éponge et , dans un mouvement ralenti et tournant de la main , je récure la dernière
assiette et je la pose sur l'égouttoir en débondant l'évier . J'appuie mes paumes sur le
bord du plan de travail en observant la rotation uniforme vers le siphon des débris
de notre repas .
- Moi . Je répète : "Je t'écoute"
- Gaby : "Tu as répondu"
- Moi : "………?……….."
- Gaby . Elle s'est penchée en avant et applique avec une excessive minutie et du bout
de son pinceau le plus fin un point de suture microscopique : "Tu as répondu . Tu as dit :
"Je t'écoute"
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