Si un jour , lecteurs , vous empruntez avec votre automobile la N 272 (celle qui
coupe l'antique merveille de Canzano en deux portions navrantes) , vous toucherez
des yeux la cruauté des hommes . La vitesse est illimitée sur cette voie ; on traverse
Canzano et ce qui reste de sa forêt pied au plancher , passant d'une vallée à l'autre en
le millième de temps qu'il fallait jadis par les chemins muletiers .
C'est la faune locale qui paie tribut à ce progrès de communication . Le lieu que les
ingénieurs de la voierie appellent B.A.U est le séjour des bêtes mortes . Je ne parle pas
ici des chats fugueurs et des chiens égarés , pas non plus des hérissons ou des rats des
champs qui forment sous toutes les latitudes des bataillons d'écrabouillés . Vous verrez
de vos yeux les pics à dos blanc , les bondrées et autours disloqués , les boyaux sanglants
des sonneurs à ventre jaune et ceux des salamandres , les fouines et belettes réduites à
l'état de carpettes . Vous verrez que le campagnol des neiges , si prude de nature , montre
au ciel ses viscères . A trente centimètres de vos visages , l'Italopodisma Lucianae
s'écrasera en taches rouges sur votre pare-brise .
jeudi 30 avril 2020
mercredi 29 avril 2020
LES LOUPS-GAROUS 2
Résumé de l'épisode précédent : trois touristes allemands et leur guide ont signalé
à Luis la présence près de la ville d'un ou plusieurs loups-garous . A bord de son 4x4 ,
Luis inspecte le secteur . Il fait nuit . Dans ses phares : un couple étrange .
De leurs brodequins , l'escogriffe saturnien et sa femelle à tête viteline bouchonnaient
les cépées . Ce craquètement rendit à Luis la chose obvie : ces quidams n'étaient peut-être
pas des loups-garous mais il les subsuma comme cette sorte de sycophantes à propos
desquels le chef de district avait fait de compendieux rapports ; il n'avait rien à tirer de
ces deux myrmidons ! . Embrayant , il les laissa à la nitescence cyprine du sombre faux-
fuyant . Les touristes allemands avaient-ils rêvé ? . Et le cicérone ? , se dit encore Luis en
frôlant à toute vitesse un échalier passementé de clisses où s'égouttaient des fromages .
Les loups-garous , ce devait être vélanie ou fuligineuses spéculations ! . Il arrêta le 4x4
sur le bas-côté déperlant (la pluie de l'orage avait coulé entre ses herbes crêpelées) .
Quand il ouvrit la portière , le parfum mellifluent du sous-bois et le son trémulant d'un
cours d'eau alentirent ses lugubres pensées . Une martre gravide à l'acmé de sa gestation
traversa la piste embrasée par les phares et tourna vers lui un oeil adamantin . Luis se
pencha , ouvrit la boîte à gants où il saisit un carnet broui de soleil et rempli de ses
miscellanées qu'en cas d'humeur languide il relisait avec profit .
Oui , sauvons les mots anciens !
(à suivre …)
à Luis la présence près de la ville d'un ou plusieurs loups-garous . A bord de son 4x4 ,
Luis inspecte le secteur . Il fait nuit . Dans ses phares : un couple étrange .
De leurs brodequins , l'escogriffe saturnien et sa femelle à tête viteline bouchonnaient
les cépées . Ce craquètement rendit à Luis la chose obvie : ces quidams n'étaient peut-être
pas des loups-garous mais il les subsuma comme cette sorte de sycophantes à propos
desquels le chef de district avait fait de compendieux rapports ; il n'avait rien à tirer de
ces deux myrmidons ! . Embrayant , il les laissa à la nitescence cyprine du sombre faux-
fuyant . Les touristes allemands avaient-ils rêvé ? . Et le cicérone ? , se dit encore Luis en
frôlant à toute vitesse un échalier passementé de clisses où s'égouttaient des fromages .
Les loups-garous , ce devait être vélanie ou fuligineuses spéculations ! . Il arrêta le 4x4
sur le bas-côté déperlant (la pluie de l'orage avait coulé entre ses herbes crêpelées) .
Quand il ouvrit la portière , le parfum mellifluent du sous-bois et le son trémulant d'un
cours d'eau alentirent ses lugubres pensées . Une martre gravide à l'acmé de sa gestation
traversa la piste embrasée par les phares et tourna vers lui un oeil adamantin . Luis se
pencha , ouvrit la boîte à gants où il saisit un carnet broui de soleil et rempli de ses
miscellanées qu'en cas d'humeur languide il relisait avec profit .
Oui , sauvons les mots anciens !
(à suivre …)
mardi 28 avril 2020
L'ABBÉ TONIÈRES 23 . LE CALICE JUSQU'À LA LIE
Super U d'Antibes . L'abbé Tonières fait ses courses avec Jeanne-Marie . Elle pousse
le caddie et , aux ordres de l'abbé , picore deci delà dans les rayons .
- L'abbé : "Qu'est-ce que je vois là , Jeanne-Marie ? … vous êtes folle ?"
Sur les strates accumulées de Mini Pastillas au poulet , Piccolinis Buitoni surgelés ,
choux de Bruxelles , Mélange carottes , Potiron pour potage , Colin d'Alaska à la pari-
sienne , Navarin de la mer , papier toilette doux blanc , Pâte à tartiner aux noisettes ,
Bananes Cavendish , oranges , pommes , poireaux , etc … etc … une bouteille trapue ,
corps court large d'épaule , cul plat épais et le col étreint par un bouchon antivol acousto-
magnétique dans la panse de laquelle l'ambre fossile d'un bourbon Woodford Reserve
Distiller's Select (39€99) dodeline capiteusement .
- Jeanne-Marie , les bras serrant sur sa poitine juvénile un paquet de pâtes Lustucru :
"Mais , mon père , c'est celui que vous préférez : le Woudforde …"
- L'abbé : "L'eusses-tu cru ? … elle est folle ! … dans le caddie ! … mon Woodford
offert à la concupiscence des mécréants !" . Agrippant Jeanne-Marie par son écharpe
et le chariot y attaché : "Par ici , je connais un endroit"
- J-M suffoque : "Vous m'étranglez ! … mon écharpe ! … où allons-nous ?"
- L'abbé : "Là où le Seigneur ne peut nous voir … le Seigneur et ses caméras de sur-
veillance" . Dans le clair-obscur (un néon défaillant) du rayon "Aliments pour nos amis
les bêtes" s'opère la magie : passe-passe du caddie à l'abyssale poche droite de la soutane
sacerdotale . "Jeanne-Marie ! , vous n'y pensez pas : 39€99 ! … ô combien de quêtes ,
combien de troncs (Oceano Nox) … allez !" , conclut-il en tapotant le popotin juvénile
de Jeanne-Marie "poussez-moi ce truc-là vers les Portes de l'Enfer" (dites aussi :
Portiques Antivol)
- J-M : "Mais , mon Père … l'alarme … le bouchon …" . Elle se signe .
- L'abbé : "Vous occupez pas de ça"
Aux caisses : attente . Queue . Barre "Client Suivant" . Abbé Tonières sifflotant .
Jeanne-Marie livide , le contenu du caddie sur le tapis-bascule de la guillotine . Caissière
charmante . Sourire : "mon Père" . "Je te bénis ma fille" , dit l'autre "combien te dois-je ?" .
Sourire encore : "87€50 … par carte ?" . "Foutre Dieu , non … en bon dollars que Celui
qui est là-haut créa le 6 juillet 1785 ou quelque chose comme ça … 88€ , garde la monnaie
… Jeanne-Marie , go ! …" . Sonnerie du portique : ding-ding !
- La caissière : "Mon Père , vos clefs peut-être ?"
- L'abbé sort de la non moins abyssale poche gauche de sa soutane un calice cabossé :
"Non , ma chérie , il n'y a d'autres clefs que celles du Paradis … c'est ce foutu calice
cabossé et déclencheur d'alarme que je vais de ce pas confier au talent stupéfiant d'un
chaudonnier-débosseleur"
le caddie et , aux ordres de l'abbé , picore deci delà dans les rayons .
- L'abbé : "Qu'est-ce que je vois là , Jeanne-Marie ? … vous êtes folle ?"
Sur les strates accumulées de Mini Pastillas au poulet , Piccolinis Buitoni surgelés ,
choux de Bruxelles , Mélange carottes , Potiron pour potage , Colin d'Alaska à la pari-
sienne , Navarin de la mer , papier toilette doux blanc , Pâte à tartiner aux noisettes ,
Bananes Cavendish , oranges , pommes , poireaux , etc … etc … une bouteille trapue ,
corps court large d'épaule , cul plat épais et le col étreint par un bouchon antivol acousto-
magnétique dans la panse de laquelle l'ambre fossile d'un bourbon Woodford Reserve
Distiller's Select (39€99) dodeline capiteusement .
- Jeanne-Marie , les bras serrant sur sa poitine juvénile un paquet de pâtes Lustucru :
"Mais , mon père , c'est celui que vous préférez : le Woudforde …"
- L'abbé : "L'eusses-tu cru ? … elle est folle ! … dans le caddie ! … mon Woodford
offert à la concupiscence des mécréants !" . Agrippant Jeanne-Marie par son écharpe
et le chariot y attaché : "Par ici , je connais un endroit"
- J-M suffoque : "Vous m'étranglez ! … mon écharpe ! … où allons-nous ?"
- L'abbé : "Là où le Seigneur ne peut nous voir … le Seigneur et ses caméras de sur-
veillance" . Dans le clair-obscur (un néon défaillant) du rayon "Aliments pour nos amis
les bêtes" s'opère la magie : passe-passe du caddie à l'abyssale poche droite de la soutane
sacerdotale . "Jeanne-Marie ! , vous n'y pensez pas : 39€99 ! … ô combien de quêtes ,
combien de troncs (Oceano Nox) … allez !" , conclut-il en tapotant le popotin juvénile
de Jeanne-Marie "poussez-moi ce truc-là vers les Portes de l'Enfer" (dites aussi :
Portiques Antivol)
- J-M : "Mais , mon Père … l'alarme … le bouchon …" . Elle se signe .
- L'abbé : "Vous occupez pas de ça"
Aux caisses : attente . Queue . Barre "Client Suivant" . Abbé Tonières sifflotant .
Jeanne-Marie livide , le contenu du caddie sur le tapis-bascule de la guillotine . Caissière
charmante . Sourire : "mon Père" . "Je te bénis ma fille" , dit l'autre "combien te dois-je ?" .
Sourire encore : "87€50 … par carte ?" . "Foutre Dieu , non … en bon dollars que Celui
qui est là-haut créa le 6 juillet 1785 ou quelque chose comme ça … 88€ , garde la monnaie
… Jeanne-Marie , go ! …" . Sonnerie du portique : ding-ding !
- La caissière : "Mon Père , vos clefs peut-être ?"
- L'abbé sort de la non moins abyssale poche gauche de sa soutane un calice cabossé :
"Non , ma chérie , il n'y a d'autres clefs que celles du Paradis … c'est ce foutu calice
cabossé et déclencheur d'alarme que je vais de ce pas confier au talent stupéfiant d'un
chaudonnier-débosseleur"
lundi 27 avril 2020
TROIS MOUCHES 187 . FEU PÂLE AU BORD DE MER
Berthe reconnut le restaurant de bord de mer où elle avait déjeuné incognito
plusieurs années auparavant avec deux marins très très amusants . Trois mouches
vermeilles et merveilleuses bourdonnaient contre son chapeau de paille . Plusieurs
extrémistes lourdement armés buvaient de la bière sur la galerie bordée de géraniums ,
parmi d'inévitables vacanciers dont quelques-uns étaient occupés à écrire à de lointains
amis .
Trois amis en vacances déjeunaient au bord de la mer . Berthe buvait incognito une
bière vermeille à l'extrémité d'une galerie occupée par une armée de mouches qui bour-
donnaient lourdement contre d'inévitables géraniums , mais ils la reconnurent sous son
chapeau de paille car , plusieurs années auparavant , elle les avait amusés dans ce
restaurant où elle écrivait à deux très très lointains et merveilleux marins en bordée .
A l'extrême bord d'une mer de géraniums vermeils qui , plusieurs années auparavant ,
était occupée par un restaurant où d'inévitables mouches bourdonnaient parmi les cha-
peaux de paille de vacanciers lourdement armés de bière , Berthe écrivait deux ou trois
merveilles très très amusantes à une galerie d'amis lointains dont plusieurs déjeunaient
et quelques-uns , en bordée - reconnaissons-le - buvaient incogito comme des marins .
plusieurs années auparavant avec deux marins très très amusants . Trois mouches
vermeilles et merveilleuses bourdonnaient contre son chapeau de paille . Plusieurs
extrémistes lourdement armés buvaient de la bière sur la galerie bordée de géraniums ,
parmi d'inévitables vacanciers dont quelques-uns étaient occupés à écrire à de lointains
amis .
Trois amis en vacances déjeunaient au bord de la mer . Berthe buvait incognito une
bière vermeille à l'extrémité d'une galerie occupée par une armée de mouches qui bour-
donnaient lourdement contre d'inévitables géraniums , mais ils la reconnurent sous son
chapeau de paille car , plusieurs années auparavant , elle les avait amusés dans ce
restaurant où elle écrivait à deux très très lointains et merveilleux marins en bordée .
A l'extrême bord d'une mer de géraniums vermeils qui , plusieurs années auparavant ,
était occupée par un restaurant où d'inévitables mouches bourdonnaient parmi les cha-
peaux de paille de vacanciers lourdement armés de bière , Berthe écrivait deux ou trois
merveilles très très amusantes à une galerie d'amis lointains dont plusieurs déjeunaient
et quelques-uns , en bordée - reconnaissons-le - buvaient incogito comme des marins .
dimanche 26 avril 2020
KRANT 211 . CE QUE NOUS CACHONS
Hommes et femmes , ils étaient nus … Le Kritik longeait une berge montagneuse
du Selat Alas où , entre d'énormes noeuds de lianes et d'arbres immenses dont les
écorces grinçaient comme les portes d'un temple , apparaissaient dans un éclair de
lumière des villages peuplés d'hommes , de femmes et d'enfants complètement nus .
- Le timonier à sa barre jetait sur cela un oeil offusqué : "Les sauvages ! … regardez
si vous l'osez … nus … nus comme des vers !"
- Monsieur Lee : "Hi , hi , hi !"
- Le timonier : "Faut-il qu'ils montrent tout !?"
- Monsieur Lee : "Monsieur le timonier , ces gens ne montrent rien !"
- Le timonier : "Ah ! … et qu'est-ce que je vois ? … pouvez-vous le dire ?"
- Monsieur Lee : "Vous voyez ce que nous cachons"
- Le timonier : "Avons-nous tort ?"
- Monsieur Lee : "Hi , hi , hi … avons-nous raison ?"
- Le timonier : "Nous ne sommes pas des animaux !"
- Monsieur Lee : "Ne le sommes-nous pas ?"
Sur la rive , une jeune fille , gracieuse et nue , regardait passer notre navire .
Elle tenait dans la main un poisson qu'elle venait de pêcher , étincelant , vif encore
et nous , de la timonerie , la regardions filer par l'arrière , immobile , comme l'image
et la preuve de l'innocence . Actionnée par cette vision de la Beauté , la pomme
d'Adam du timonier se mit à voyager dans son énorme cou .
- Monsieur Lee : "Monsieur le timonier , la pudeur est un feu qui vous brûle !"
- Le timonier : "………"
- Monsieur Lee : "Hi , hi , hi !"
du Selat Alas où , entre d'énormes noeuds de lianes et d'arbres immenses dont les
écorces grinçaient comme les portes d'un temple , apparaissaient dans un éclair de
lumière des villages peuplés d'hommes , de femmes et d'enfants complètement nus .
- Le timonier à sa barre jetait sur cela un oeil offusqué : "Les sauvages ! … regardez
si vous l'osez … nus … nus comme des vers !"
- Monsieur Lee : "Hi , hi , hi !"
- Le timonier : "Faut-il qu'ils montrent tout !?"
- Monsieur Lee : "Monsieur le timonier , ces gens ne montrent rien !"
- Le timonier : "Ah ! … et qu'est-ce que je vois ? … pouvez-vous le dire ?"
- Monsieur Lee : "Vous voyez ce que nous cachons"
- Le timonier : "Avons-nous tort ?"
- Monsieur Lee : "Hi , hi , hi … avons-nous raison ?"
- Le timonier : "Nous ne sommes pas des animaux !"
- Monsieur Lee : "Ne le sommes-nous pas ?"
Sur la rive , une jeune fille , gracieuse et nue , regardait passer notre navire .
Elle tenait dans la main un poisson qu'elle venait de pêcher , étincelant , vif encore
et nous , de la timonerie , la regardions filer par l'arrière , immobile , comme l'image
et la preuve de l'innocence . Actionnée par cette vision de la Beauté , la pomme
d'Adam du timonier se mit à voyager dans son énorme cou .
- Monsieur Lee : "Monsieur le timonier , la pudeur est un feu qui vous brûle !"
- Le timonier : "………"
- Monsieur Lee : "Hi , hi , hi !"
samedi 25 avril 2020
KRANT 210 . CHEZ MOI
Les lumières de Tambak venaient de sombrer sous l'Île de Java quand le capitaine
m'aborda avec une question fortuite , bien dans sa manière :
- "Où est votre maison , chef ?"
- Moi : "Là-bas …" (geste vague évoquant un lieu si éloigné qu'oublié) … "près de
Koenigsberg … à la campagne …"
- Krant , après un silence , en bourrant sa pipe : "Y êtes-vous né ?"
- Moi : "J'y suis né , capitaine"
- Krant . Il s'accoude au bastingage : "Comment est-elle votre maison ?"
- Moi : "Je ne saurais la décrire , capitaine … c'est une pauvre maison … la lumière
d'été entre par une porte , celle du potager … il y a des coins sombres … un buffet en
chêne blond … sculpté de coquilles … une odeur de cire … des jonquilles coupées ,
dans un vase … une soupe sur le feu … je pense que c'est une soupe de poireaux …
une tenture épaisse cache l'escalier et ses marches craquantes … il y a un chat , capi-
taine , un énorme chat gris sur la table où ma petite mère a coupé un oignon … la voix
de mon père … il travaille dans le potager … l'ombre d'un nuage cérémonieux et lent ,
chargé de mer … il vient de la Baltique et frôle mes tilleuls … et le feu , bien entendu ,
le foyer en fonte en hiver , quand les volets tremblent sous le vent … la chaleur de
l'édredon , l'odeur des plumes et les battements de mon coeur …"
- Krant : "Je vois , chef …"
m'aborda avec une question fortuite , bien dans sa manière :
- "Où est votre maison , chef ?"
- Moi : "Là-bas …" (geste vague évoquant un lieu si éloigné qu'oublié) … "près de
Koenigsberg … à la campagne …"
- Krant , après un silence , en bourrant sa pipe : "Y êtes-vous né ?"
- Moi : "J'y suis né , capitaine"
- Krant . Il s'accoude au bastingage : "Comment est-elle votre maison ?"
- Moi : "Je ne saurais la décrire , capitaine … c'est une pauvre maison … la lumière
d'été entre par une porte , celle du potager … il y a des coins sombres … un buffet en
chêne blond … sculpté de coquilles … une odeur de cire … des jonquilles coupées ,
dans un vase … une soupe sur le feu … je pense que c'est une soupe de poireaux …
une tenture épaisse cache l'escalier et ses marches craquantes … il y a un chat , capi-
taine , un énorme chat gris sur la table où ma petite mère a coupé un oignon … la voix
de mon père … il travaille dans le potager … l'ombre d'un nuage cérémonieux et lent ,
chargé de mer … il vient de la Baltique et frôle mes tilleuls … et le feu , bien entendu ,
le foyer en fonte en hiver , quand les volets tremblent sous le vent … la chaleur de
l'édredon , l'odeur des plumes et les battements de mon coeur …"
- Krant : "Je vois , chef …"
vendredi 24 avril 2020
DESMOND 132 . BIRTHDAY WISH
J'entre dans le bureau privé du Président . Il est de profil dans son fauteuil pivotant ,
les lunettes suspendues par une branche aux doigts de sa main gauche brandillent dans
l'air enfumé de la pièce (illustrant la présence du Secrétaire d'État dans un passé immé-
diat) le combiné du téléphone qui le relie directement à Maryline dans la main droite
collée à l'oreille . Il me fait signe d'avancer . Je reste debout derrière l'une des deux
chaises dédiées aux visiteurs .
- "Oui … a-u … pas o … et un C majuscule … surtout , hein … chère oui , comme
chère … non , Maryline , pas chérie … chère , ça veut dire qu'on tient à elle … chérie ,
c'est … non … c'est plus … oui , relisez à partir de là … hmm-hmm … oui … virgule
… non … je crois qu'il y a 2 n … un y ? … non … non-non … c'est un i … vérifiez …
c'est aujourd'hui … par télégramme , s'il vous plaît … une cédille ? … what is that ? …
oui … si vous êtes sûre … ouais … do as you wish … non , reprenons , où en étais-je ?
… votre … est-ce que "ta" ne serait pas mieux ? … osé ? … ta , t-a … mon-ton-ta …
trop quoi ? … euh … je crois qu'il y a un accord … oui … past participle … be careful ,
Maryline ! … ton magnifique grâce , c'est très bien … n'oubliez pas le circumflex accent
… I'm sure … (il fait tournoyer sa paire de lunettes) … absolutely sure … beauté ? …
non … non … a birthday wish is different from a love letter , is it not ? … virgule …
n'oubliez pas la virgule , sinon it does not make sense … what do you say ? … yes …
oui … non … euh … à Desmond ? … oui , devant moi … non , ça va … c'est bien
comme ça … relisez , je vous prie … oui … hmm-hmm-hmm … Georges ? … non …
ah ? … pourquoi pas … ah-ah-ah ! … je lui demanderai (il me regarde) … oui … Sucre
d'Orge … oui , je sais , Maryline (il se rembrunit) … ces Mirage à la Lybie ! … oui-oui
… never mind ! … euh … bisous … ton Richard … euh , non , Maryline , barrez ton" .
Il raccroche .
- A moi , ouverture en grand du clavier de sa denture : "C'est l'anniversaire de Claude
aujourd'hui … je lui envoie un compliment … en français !"
- Moi : "Claude ?"
- Lui : "Claude Pompomgirl , Desmond ! … évidemment ! … la Grande Claude ,
la femme de Georges !"
les lunettes suspendues par une branche aux doigts de sa main gauche brandillent dans
l'air enfumé de la pièce (illustrant la présence du Secrétaire d'État dans un passé immé-
diat) le combiné du téléphone qui le relie directement à Maryline dans la main droite
collée à l'oreille . Il me fait signe d'avancer . Je reste debout derrière l'une des deux
chaises dédiées aux visiteurs .
- "Oui … a-u … pas o … et un C majuscule … surtout , hein … chère oui , comme
chère … non , Maryline , pas chérie … chère , ça veut dire qu'on tient à elle … chérie ,
c'est … non … c'est plus … oui , relisez à partir de là … hmm-hmm … oui … virgule
… non … je crois qu'il y a 2 n … un y ? … non … non-non … c'est un i … vérifiez …
c'est aujourd'hui … par télégramme , s'il vous plaît … une cédille ? … what is that ? …
oui … si vous êtes sûre … ouais … do as you wish … non , reprenons , où en étais-je ?
… votre … est-ce que "ta" ne serait pas mieux ? … osé ? … ta , t-a … mon-ton-ta …
trop quoi ? … euh … je crois qu'il y a un accord … oui … past participle … be careful ,
Maryline ! … ton magnifique grâce , c'est très bien … n'oubliez pas le circumflex accent
… I'm sure … (il fait tournoyer sa paire de lunettes) … absolutely sure … beauté ? …
non … non … a birthday wish is different from a love letter , is it not ? … virgule …
n'oubliez pas la virgule , sinon it does not make sense … what do you say ? … yes …
oui … non … euh … à Desmond ? … oui , devant moi … non , ça va … c'est bien
comme ça … relisez , je vous prie … oui … hmm-hmm-hmm … Georges ? … non …
ah ? … pourquoi pas … ah-ah-ah ! … je lui demanderai (il me regarde) … oui … Sucre
d'Orge … oui , je sais , Maryline (il se rembrunit) … ces Mirage à la Lybie ! … oui-oui
… never mind ! … euh … bisous … ton Richard … euh , non , Maryline , barrez ton" .
Il raccroche .
- A moi , ouverture en grand du clavier de sa denture : "C'est l'anniversaire de Claude
aujourd'hui … je lui envoie un compliment … en français !"
- Moi : "Claude ?"
- Lui : "Claude Pompomgirl , Desmond ! … évidemment ! … la Grande Claude ,
la femme de Georges !"
jeudi 23 avril 2020
ALBERTE
Je me souviens vaguement d'Alberte . Elle fut une de mes premières . Alberte ! ,
prénom hilarant … et c'est à ce prénom que je dois d'avoir encore quelques souvenirs
de cette fille . Alberte était la rejetonne d'un physicien et d'une physicienne , il et elle ,
le père et la mère . Et si vous avez compris pourquoi "Alberte" , vous avez tout faux ! :
Albert Einstein , le père de la Relativité , le contributeur de la Physique Quantique ,
l'interprétateur de l'effet photoélectrique , l'inventeur de la notion d'émission stimulée ,
le bonhomme formidable qui a établi une équivalence entre la masse et l'énergie d'un
système , ce gars-là n'est pour rien dans le prénom d'Alberte ! . Alberte (pourquoi n'ont-
ils pas choisi Albertine , c'est bien plus gracieux !) doit son prénom à un autre Albert
moins connu , doté lui aussi d'un cerveau considérable bien qu'inférieur à celui du prix
Nobel (1921) , fort éloigné des cosmogonies , plutôt tourné vers les problèmes pratiques
pour leur trouver des solutions astucieuses . Par exemple , comment s'y retrouver dans
les égouts de Nice en partant du Palais des Expositions , suivre leur cours nauséabond
sur deux kilomètres jusqu'à l'angle de la rue Gustave-Deloye et de la rue Hôtel-des-Postes
et là , creuser un tunnel pour accéder à la salle des coffres de la Société Générale .
Comment les parents d'Alberte , chercheurs au CNRS (Physique théorique) mal payés
et payés avec un élastique , auraient résisté au charme d'Albert Spaggiari , le "Cerveau"
du "Casse du Siècle " ?
prénom hilarant … et c'est à ce prénom que je dois d'avoir encore quelques souvenirs
de cette fille . Alberte était la rejetonne d'un physicien et d'une physicienne , il et elle ,
le père et la mère . Et si vous avez compris pourquoi "Alberte" , vous avez tout faux ! :
Albert Einstein , le père de la Relativité , le contributeur de la Physique Quantique ,
l'interprétateur de l'effet photoélectrique , l'inventeur de la notion d'émission stimulée ,
le bonhomme formidable qui a établi une équivalence entre la masse et l'énergie d'un
système , ce gars-là n'est pour rien dans le prénom d'Alberte ! . Alberte (pourquoi n'ont-
ils pas choisi Albertine , c'est bien plus gracieux !) doit son prénom à un autre Albert
moins connu , doté lui aussi d'un cerveau considérable bien qu'inférieur à celui du prix
Nobel (1921) , fort éloigné des cosmogonies , plutôt tourné vers les problèmes pratiques
pour leur trouver des solutions astucieuses . Par exemple , comment s'y retrouver dans
les égouts de Nice en partant du Palais des Expositions , suivre leur cours nauséabond
sur deux kilomètres jusqu'à l'angle de la rue Gustave-Deloye et de la rue Hôtel-des-Postes
et là , creuser un tunnel pour accéder à la salle des coffres de la Société Générale .
Comment les parents d'Alberte , chercheurs au CNRS (Physique théorique) mal payés
et payés avec un élastique , auraient résisté au charme d'Albert Spaggiari , le "Cerveau"
du "Casse du Siècle " ?
mercredi 22 avril 2020
PRINTEMPS 2
Cabrioles
D'insectes bombillants …
Dans des tourbillons d'air ,
Rêve de meeting
En bordure de mes draps .
7 heures .
Loopings de rideaux ,
Vertige du printemps .
D'insectes bombillants …
Dans des tourbillons d'air ,
Rêve de meeting
En bordure de mes draps .
7 heures .
Loopings de rideaux ,
Vertige du printemps .
mardi 21 avril 2020
JULES 15 . LA GRANDE ILLUSION
Jules a de la fièvre : 38°2 . Soeur Marie de la Sainte Croix est à son chevet .
- Jules : "Ma soeur , j'ai une révélation à vous faire"
- Smdlsc s'assoit à sa place habituelle , sur le bord du lit . Elle tapote la main fébrile
de Jules : "J'adore les révélations !"
- Jules hésite : "… c'est que … c'est que c'est assez stupéfiant ! … plus renversant
que la physique quantique …"
- Smdlsc , affectueusement , se rétracte : "Oh ! … est-ce possible ?"
- Jules : "J'en ai bien peur"
- Smdlsc . Elle regarde Jules dans les yeux : "Allez , dites-moi"
- Jules tergiverse : "… euh … comment dire ? …"
- Smdlsc rajuste sa robe puis appuie le menton sur ses mains croisées , toute attention .
- Jules se lance : "Le réel n'existe pas !"
- Smdlsc : "Doux Jésus !"
- Jules : "Les choses que nous voyons n'existent pas … mirages , hallucinations ! …
le monde est un fantasme !"
- Smdlsc se tape sur les cuisses : "D'où sortez-vous cette sottise ?"
- Jules : "Nous rêvons …"
- Smdlsc éclate de rire : "Ah-ah-ah ! …" . Son rire argentin rebondit sur les murs
immaculés de la chambre , ô parallélépipédisme hospitalier !
- Jules : "Le monde , ma soeur , est un spectacle coloré , mais c'est une illusion …"
- Smdlsc s'esclaffe : "Ah-ah-ah !" … se retape les gigues .
- Jules : "Il est donc inutile de se demander comment ça marche"
- Smdlsc essuie dans son voile les larmes qui lui sont venues aux yeux .
- Jules : "Seule l'illusion est réelle"
- Smdlsc , bridant son rire avec peine : "C'est déjà pas mal !"
- Jules : "……..?…….. vous trouvez ?"
- Smdlsc , soudain pensive , dévisage son malade .
- Jules , levant un index péremptoire : "Seule existe la conscience de l'illusion …"
- Smdlsc : "Vous avez raison , Monsieur Jules … la Grande Illusion … l'Illusion
Primordiale : Dieu … la terre était vide st vague … Genèse . chapitre 1 . verset 2 …
et bien , qu'attendons-nous ? … créons !"
- Jules : "…….?………"
- Smdlsc enserre les poignets de Jules : "Mais avant de nous mettre au travail , nous
prendrons bien un cachet d'aspirine ?"
- Jules : "Ma soeur , j'ai une révélation à vous faire"
- Smdlsc s'assoit à sa place habituelle , sur le bord du lit . Elle tapote la main fébrile
de Jules : "J'adore les révélations !"
- Jules hésite : "… c'est que … c'est que c'est assez stupéfiant ! … plus renversant
que la physique quantique …"
- Smdlsc , affectueusement , se rétracte : "Oh ! … est-ce possible ?"
- Jules : "J'en ai bien peur"
- Smdlsc . Elle regarde Jules dans les yeux : "Allez , dites-moi"
- Jules tergiverse : "… euh … comment dire ? …"
- Smdlsc rajuste sa robe puis appuie le menton sur ses mains croisées , toute attention .
- Jules se lance : "Le réel n'existe pas !"
- Smdlsc : "Doux Jésus !"
- Jules : "Les choses que nous voyons n'existent pas … mirages , hallucinations ! …
le monde est un fantasme !"
- Smdlsc se tape sur les cuisses : "D'où sortez-vous cette sottise ?"
- Jules : "Nous rêvons …"
- Smdlsc éclate de rire : "Ah-ah-ah ! …" . Son rire argentin rebondit sur les murs
immaculés de la chambre , ô parallélépipédisme hospitalier !
- Jules : "Le monde , ma soeur , est un spectacle coloré , mais c'est une illusion …"
- Smdlsc s'esclaffe : "Ah-ah-ah !" … se retape les gigues .
- Jules : "Il est donc inutile de se demander comment ça marche"
- Smdlsc essuie dans son voile les larmes qui lui sont venues aux yeux .
- Jules : "Seule l'illusion est réelle"
- Smdlsc , bridant son rire avec peine : "C'est déjà pas mal !"
- Jules : "……..?…….. vous trouvez ?"
- Smdlsc , soudain pensive , dévisage son malade .
- Jules , levant un index péremptoire : "Seule existe la conscience de l'illusion …"
- Smdlsc : "Vous avez raison , Monsieur Jules … la Grande Illusion … l'Illusion
Primordiale : Dieu … la terre était vide st vague … Genèse . chapitre 1 . verset 2 …
et bien , qu'attendons-nous ? … créons !"
- Jules : "…….?………"
- Smdlsc enserre les poignets de Jules : "Mais avant de nous mettre au travail , nous
prendrons bien un cachet d'aspirine ?"
LE SOLDAT FERRARI 5
L'autre jour , je vous ai menti . On peut , en 2009 , rejoindre Canzano par autre chose
qu'un mauvais chemin . Il suffit de mettre les roues de son automobile sur la quatre voies
que les Ponts et Chaussées ont enfoncée dans la forêt . C'est beaucoup plus pratique .
Bien sûr , la forêt de mélèzes et de pins sembros a morflé et même on peut dire qu'à cause
du trafic elle a aujourd'hui disparu .
La nationale 272 coupe le village en deux . Elle emprunte l'ancienne Via Principale et ,
vu sa largeur , on a exproprié les trois-quarts des indigènes et rasé les maisons insalubres
(elles étaient sous le minimum sanitaire admis par l'Administration) qui se trouvaient malencontreusement placées sur le nouveau tracé . Les ingénieurs ont d'autre part retenu
ce site de toute beauté (on y a vue sur les deux vallées) pour aménager deux stations-
service - une de chaque côté de la voie rapide - une aire de repos pour automobilistes
épuisés et un parking pour vingt mille bagnoles . L'ensemble brille joliment d'enseignes
multicolores plastifiées .
Les Pouvoirs Publics ont relogé les villageois sur les hauteurs de Canzano dans une cité
en béton dont les avenues , tirées à la perpendiculaire , sont numérotées de 1 à 50 et ornées
de lampadaires au sodium . C'est ce quartier qu'on a d'abord appelé Canzano 2000 , puis
Super-Canzano .
Quand on y vient en hiver pour le ski , c'est vrai que c'est super !
qu'un mauvais chemin . Il suffit de mettre les roues de son automobile sur la quatre voies
que les Ponts et Chaussées ont enfoncée dans la forêt . C'est beaucoup plus pratique .
Bien sûr , la forêt de mélèzes et de pins sembros a morflé et même on peut dire qu'à cause
du trafic elle a aujourd'hui disparu .
La nationale 272 coupe le village en deux . Elle emprunte l'ancienne Via Principale et ,
vu sa largeur , on a exproprié les trois-quarts des indigènes et rasé les maisons insalubres
(elles étaient sous le minimum sanitaire admis par l'Administration) qui se trouvaient malencontreusement placées sur le nouveau tracé . Les ingénieurs ont d'autre part retenu
ce site de toute beauté (on y a vue sur les deux vallées) pour aménager deux stations-
service - une de chaque côté de la voie rapide - une aire de repos pour automobilistes
épuisés et un parking pour vingt mille bagnoles . L'ensemble brille joliment d'enseignes
multicolores plastifiées .
Les Pouvoirs Publics ont relogé les villageois sur les hauteurs de Canzano dans une cité
en béton dont les avenues , tirées à la perpendiculaire , sont numérotées de 1 à 50 et ornées
de lampadaires au sodium . C'est ce quartier qu'on a d'abord appelé Canzano 2000 , puis
Super-Canzano .
Quand on y vient en hiver pour le ski , c'est vrai que c'est super !
lundi 20 avril 2020
JULES 14 . QUESTION D'ESPACE
Jules est en forme . Il a pu quitter son lit médicalisé et s'asseoir dans son fauteuil
roulant . Le soleil matinal se déverse joyeusement dans sa chambre opportunément
orientée à l'est . Oui , Jules est en super-forme … caoutchouctement suiksuiksuik
de roulettes : Soeur Marie de la Sainte Croix pousse sur le linoléum le chariot du
petit déjeuner . Café fumant , croissant beurré , tranche de pain grillé , coupe de
confiture de framboise (maison , car il y a des framboisiers dans le jardin de la
maison de retraite et Smdlsc est experte en marmelade et bassines de cuivre)
- Smdlsc accotant le chariot au fauteuil de Monsieur Jules : "Vous m'avez l'air en
pleine forme !" . Puis elle s'assoit au bord du lit .
- Jules , les bras à demi-levés sur son festin , hésitant entre le croissant tout de suite
et la biscotte juste après : "Aujourd'hui , ma soeur , forme olympique ! … je ferais
un marathon ! … je suis à l'étroit … j'ai besoin d'espace !"
- Smdlsc : "De quel espace parlez-vous ?" , dit-elle en se tortillant pour caler son
derrière d'intellectuelle dans le matelas .
- Jules : "De quel espace ? … mais (geste grandiose du bras gauche , énonciation
emphatique) … de l'espace !"
- Smdlsc : "Physique ou mathématique ?"
- Jules qui , finalement , a gardé le croissant pour la fin , suspend un temps la trajectoire
de la biscotte : "Il y a un espace mathématique ?"
- Smdlsc : "Oui , doux Jésus ! … et un espace physique"
- Jules s'active autour de la coupe de confiture : "C'est à celui-là , certainement ,
que je faisais allusion"
- Smdlsc : "Celui-là est le produit direct de nos perceptions … il n'est pas constitué de
points … c'est un continu subjectif"
- Jules , entre deux craquements de biscotte : "Ah ? … je n'avais pas remarqué"
- Smdlsc : "Attention , Monsieur Jules , vous aller tacher votre pyjama … alors que
l'espace mathématique est véritablement constitué de points … d'objets idéaux dont …"
- Jules , la bouche pleine : "Je vous coupe , ma soeur … veuillez m'excuser mais je n'ai
que faire de cet espace-là"
- Smdlsc : "Vous avez tort … vous devriez lire ce que dit Wehl à ce propos"
- Jules s'attaque au croissant , le coupe en deux et le fourre de l'excellente confiture :
"Ah , ma soeur , sans vous commander , pouvez-vous me prendre ce livre à la biblio-
thèque ?"
- Smdlsc : "Espace , Temps , Matière" , par Hermann Wehl !? … je doute que nous
l'ayons dans les rayons de la bibliothèque !"
- Jules s'essuie la bouche : "Non-non , ma soeur , vous n'y êtes pas … je ne lirai pas
la théorie de ce Monsieur Ouel … si vous pouviez m'apporter "Tintin en Amérique"
- Smdlsc groupe les jambes , bascule sur le dos (demi-roulade arrière) et , claquant
haut les mains , exulte : "Tintin en Amérique" ! … les grands espaces ! ... le Far West !"
roulant . Le soleil matinal se déverse joyeusement dans sa chambre opportunément
orientée à l'est . Oui , Jules est en super-forme … caoutchouctement suiksuiksuik
de roulettes : Soeur Marie de la Sainte Croix pousse sur le linoléum le chariot du
petit déjeuner . Café fumant , croissant beurré , tranche de pain grillé , coupe de
confiture de framboise (maison , car il y a des framboisiers dans le jardin de la
maison de retraite et Smdlsc est experte en marmelade et bassines de cuivre)
- Smdlsc accotant le chariot au fauteuil de Monsieur Jules : "Vous m'avez l'air en
pleine forme !" . Puis elle s'assoit au bord du lit .
- Jules , les bras à demi-levés sur son festin , hésitant entre le croissant tout de suite
et la biscotte juste après : "Aujourd'hui , ma soeur , forme olympique ! … je ferais
un marathon ! … je suis à l'étroit … j'ai besoin d'espace !"
- Smdlsc : "De quel espace parlez-vous ?" , dit-elle en se tortillant pour caler son
derrière d'intellectuelle dans le matelas .
- Jules : "De quel espace ? … mais (geste grandiose du bras gauche , énonciation
emphatique) … de l'espace !"
- Smdlsc : "Physique ou mathématique ?"
- Jules qui , finalement , a gardé le croissant pour la fin , suspend un temps la trajectoire
de la biscotte : "Il y a un espace mathématique ?"
- Smdlsc : "Oui , doux Jésus ! … et un espace physique"
- Jules s'active autour de la coupe de confiture : "C'est à celui-là , certainement ,
que je faisais allusion"
- Smdlsc : "Celui-là est le produit direct de nos perceptions … il n'est pas constitué de
points … c'est un continu subjectif"
- Jules , entre deux craquements de biscotte : "Ah ? … je n'avais pas remarqué"
- Smdlsc : "Attention , Monsieur Jules , vous aller tacher votre pyjama … alors que
l'espace mathématique est véritablement constitué de points … d'objets idéaux dont …"
- Jules , la bouche pleine : "Je vous coupe , ma soeur … veuillez m'excuser mais je n'ai
que faire de cet espace-là"
- Smdlsc : "Vous avez tort … vous devriez lire ce que dit Wehl à ce propos"
- Jules s'attaque au croissant , le coupe en deux et le fourre de l'excellente confiture :
"Ah , ma soeur , sans vous commander , pouvez-vous me prendre ce livre à la biblio-
thèque ?"
- Smdlsc : "Espace , Temps , Matière" , par Hermann Wehl !? … je doute que nous
l'ayons dans les rayons de la bibliothèque !"
- Jules s'essuie la bouche : "Non-non , ma soeur , vous n'y êtes pas … je ne lirai pas
la théorie de ce Monsieur Ouel … si vous pouviez m'apporter "Tintin en Amérique"
- Smdlsc groupe les jambes , bascule sur le dos (demi-roulade arrière) et , claquant
haut les mains , exulte : "Tintin en Amérique" ! … les grands espaces ! ... le Far West !"
COTE 137 . 150 . VIVE LES PATROUILLES !
- Martial : "Guillou a son compte !"
Guillou bredouille , à genoux , le visage collé au parados .
- Martial : "Il a son compte …"
- Moi . Je ramasse la gourde de Guillou : elle est vide . Je la retourne : "Plus une goutte !"
- La tête du capitaine par la porte de la cagna : "Qu'est-ce qui se passe ?"
- Martial : "C'est rien mon capitaine … c'est Guillou"
- Le capitaine : "Qu'est-ce qu'il a ?"
- "Il est pas bien" . Bourrade de Martial sur l'épaule de Guillou : "Dis Guillou , t'es saoul ?"
- Guillou , les yeux à demi-fermés , tourne vers nous sa tronche aux lèvres molles : "Hein ?"
- Martial : "Pour la patrouille , mon capitaine , Guillou faut pas y compter"
- Le capitaine : "Qui vous parle de patrouille ?"
- Martial : "Guillou , y'était pas de patrouille ?"
- Le capitaine : "Euh … si … il me semble" . Consultant son carnet : "Oui … Guillou …
patrouille" . Notre camarade vomit sur le caillebotis . "Pfff ! … il me faut un remplaçant"
- Martial avance d'un pas vers le capitaine .
- Le capitaine : "Pas vous , Martial … pas tous les jours !"
- Martial : "Pourtant …"
- Le capitaine , suspicieux : "Dites donc , Martial … qu'est-ce qui s'est passé avec Guillou ?
… c'est pas son habitude de …"
- Martial : "… de se saouler la gueule ? … non …"
- Le capitaine : "Alors ?"
- Martial : "Un défi … vous savez comment il est Guillou , mon capitaine … un fier à bras
… pas du genre à se dégonfler … ta gourde cul sec , je lui ai dit"
- Le capitaine : "…….?……."
- Martial : "Euh … pour la patrouille ?"
- Le capitaine pointe Martial du doigt : "Martial ! … consigné ! … privé de patrouille
pendant trois jours !"
Guillou bredouille , à genoux , le visage collé au parados .
- Martial : "Il a son compte …"
- Moi . Je ramasse la gourde de Guillou : elle est vide . Je la retourne : "Plus une goutte !"
- La tête du capitaine par la porte de la cagna : "Qu'est-ce qui se passe ?"
- Martial : "C'est rien mon capitaine … c'est Guillou"
- Le capitaine : "Qu'est-ce qu'il a ?"
- "Il est pas bien" . Bourrade de Martial sur l'épaule de Guillou : "Dis Guillou , t'es saoul ?"
- Guillou , les yeux à demi-fermés , tourne vers nous sa tronche aux lèvres molles : "Hein ?"
- Martial : "Pour la patrouille , mon capitaine , Guillou faut pas y compter"
- Le capitaine : "Qui vous parle de patrouille ?"
- Martial : "Guillou , y'était pas de patrouille ?"
- Le capitaine : "Euh … si … il me semble" . Consultant son carnet : "Oui … Guillou …
patrouille" . Notre camarade vomit sur le caillebotis . "Pfff ! … il me faut un remplaçant"
- Martial avance d'un pas vers le capitaine .
- Le capitaine : "Pas vous , Martial … pas tous les jours !"
- Martial : "Pourtant …"
- Le capitaine , suspicieux : "Dites donc , Martial … qu'est-ce qui s'est passé avec Guillou ?
… c'est pas son habitude de …"
- Martial : "… de se saouler la gueule ? … non …"
- Le capitaine : "Alors ?"
- Martial : "Un défi … vous savez comment il est Guillou , mon capitaine … un fier à bras
… pas du genre à se dégonfler … ta gourde cul sec , je lui ai dit"
- Le capitaine : "…….?……."
- Martial : "Euh … pour la patrouille ?"
- Le capitaine pointe Martial du doigt : "Martial ! … consigné ! … privé de patrouille
pendant trois jours !"
dimanche 19 avril 2020
L'ABBÉ TONIÈRES 22 . CAP D'AGDE
Le V8 ronronne devant l'immeuble où Marie-Madeleine et Jeanne-Marie partagent
un F2 en colocation . L'abbé Tonières klaxonne . Le week-end est prometteur : soleil
sur la Côte . L'abbé , Ray-Ban Aviator sur le nez , re-klaxonne . Ça vient ? … enfin
paraissent les deux filles ; elles arborent leur belle tenue bleu marine de cheftaine :
jupe plissée , gilet à petit col rond , foulard , socquettes blanches , chaussures de marche .
- L'abbé : "Qu'est-ce que c'est que ça !?"
- Marie-Madeleine : "Quoi ?"
- L'abbé : "Ces tenues ?"
- Jeanne-Marie : "Ben , mon Père …" , elle écarte les bras en déployant sa jupe en
éventail : "… c'est nos tenues de Guides de France !"
- L'abbé (en soutane) : "C'est grotesque !"
- Marie-Madeleine : "Grotesque ?" … A Jeanne-Matie qui commence à pleurnicher :
"Jeanne-Marie , commence pas à braire !"
- L'abbé : "Vous ne pensez quand même pas que je vais m'exhiber avec deux gonzesses
accoutrées comme des … comme des …"
- Marie-Madeleine : "Comme des quoi ?"
- L'abbé , main gauche négligemment posée sur le volant de la Ferrari , le bras droit passé
au-dessus du siège passager : "C'est … c'est indécent ! … nous allons au Cap d'Agde ! …
non mais je rêve les filles ! … au Cap d'Agde !"
- Jeanne-Marie : "Mon Père , j'ai mon maillot en-dessous"
- L'abbé : "Un maillot de bain !? … au Cap d'Agde , Jeanne-Marie ! … comment vous
expliquer ? … dites-lui , Marie-Madeleine" . Il consulte sa Rolex : "Mais grouillez-vous !
… on perd du temps" . Tapant sur le volant du monstre : "Ces bêtes-là , même au point
mort , ça consomme !"
un F2 en colocation . L'abbé Tonières klaxonne . Le week-end est prometteur : soleil
sur la Côte . L'abbé , Ray-Ban Aviator sur le nez , re-klaxonne . Ça vient ? … enfin
paraissent les deux filles ; elles arborent leur belle tenue bleu marine de cheftaine :
jupe plissée , gilet à petit col rond , foulard , socquettes blanches , chaussures de marche .
- L'abbé : "Qu'est-ce que c'est que ça !?"
- Marie-Madeleine : "Quoi ?"
- L'abbé : "Ces tenues ?"
- Jeanne-Marie : "Ben , mon Père …" , elle écarte les bras en déployant sa jupe en
éventail : "… c'est nos tenues de Guides de France !"
- L'abbé (en soutane) : "C'est grotesque !"
- Marie-Madeleine : "Grotesque ?" … A Jeanne-Matie qui commence à pleurnicher :
"Jeanne-Marie , commence pas à braire !"
- L'abbé : "Vous ne pensez quand même pas que je vais m'exhiber avec deux gonzesses
accoutrées comme des … comme des …"
- Marie-Madeleine : "Comme des quoi ?"
- L'abbé , main gauche négligemment posée sur le volant de la Ferrari , le bras droit passé
au-dessus du siège passager : "C'est … c'est indécent ! … nous allons au Cap d'Agde ! …
non mais je rêve les filles ! … au Cap d'Agde !"
- Jeanne-Marie : "Mon Père , j'ai mon maillot en-dessous"
- L'abbé : "Un maillot de bain !? … au Cap d'Agde , Jeanne-Marie ! … comment vous
expliquer ? … dites-lui , Marie-Madeleine" . Il consulte sa Rolex : "Mais grouillez-vous !
… on perd du temps" . Tapant sur le volant du monstre : "Ces bêtes-là , même au point
mort , ça consomme !"
samedi 18 avril 2020
AUDIENCE PONTIFICALE 12
JP II est tassé sur son trône . Un oeil fermé , l'autre mi-clos sous un sourcil
buissonnant .
- Moi : "Je ne poserai pas de question , Très-Saint-Père … je te le promets"
- JP II : "J'aime mieux ça , mon fils … tu progresses"
- Moi . Je cite : "Au temps de Pâques , les onze disciples s'en allèrent en Galilée …"
- JP II : "Mathieu , 28 . 16-20"
- Moi : "Chapeau ! … ah , Saint-Père , vous m'épatez !"
- JP II lève de son accoudoir une modeste main droite : "Normal … c'est mon
boulot"
- Moi , reprenant ma lecture : "… à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se
rendre …"
- JP II prolonge : "… quand ils le virent , ils se prosternèrent"
- Moi : "Incroyable ! … c'est exactement ce que dit Mathieu"
- JP II , pris au jeu : "Tu veux que je continue ?"
- Moi : "Oui … allez-y , pour voir"
- JP II : "… mais certains eurent un doute"
- Moi . Je consulte le texte : "Ah , non … c'est pas ça ! … il est écrit : "mais certains
eurent DES doutes"
- JP II : "Oh , tu chipotes , mon fils … UN ou DES doutes , c'est la même chose"
- Moi : "Pas d'accord ! … dans le premier cas , ils eurent tous le MÊME doute , dans
le second , ils eurent tous des doutes mais peut-être pas les MÊMES … et , à propos ,
de quel(s) doute(s) s'agissait-il ?"
- JP II : "Qu'est-ce que j'en sais ? … va , mon fils" . Il me bénit .
buissonnant .
- Moi : "Je ne poserai pas de question , Très-Saint-Père … je te le promets"
- JP II : "J'aime mieux ça , mon fils … tu progresses"
- Moi . Je cite : "Au temps de Pâques , les onze disciples s'en allèrent en Galilée …"
- JP II : "Mathieu , 28 . 16-20"
- Moi : "Chapeau ! … ah , Saint-Père , vous m'épatez !"
- JP II lève de son accoudoir une modeste main droite : "Normal … c'est mon
boulot"
- Moi , reprenant ma lecture : "… à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se
rendre …"
- JP II prolonge : "… quand ils le virent , ils se prosternèrent"
- Moi : "Incroyable ! … c'est exactement ce que dit Mathieu"
- JP II , pris au jeu : "Tu veux que je continue ?"
- Moi : "Oui … allez-y , pour voir"
- JP II : "… mais certains eurent un doute"
- Moi . Je consulte le texte : "Ah , non … c'est pas ça ! … il est écrit : "mais certains
eurent DES doutes"
- JP II : "Oh , tu chipotes , mon fils … UN ou DES doutes , c'est la même chose"
- Moi : "Pas d'accord ! … dans le premier cas , ils eurent tous le MÊME doute , dans
le second , ils eurent tous des doutes mais peut-être pas les MÊMES … et , à propos ,
de quel(s) doute(s) s'agissait-il ?"
- JP II : "Qu'est-ce que j'en sais ? … va , mon fils" . Il me bénit .
vendredi 17 avril 2020
TROIS MOUCHES 186 . FÊTE FORAINE À PORT-SOUDAN
Il y avait tout de même , à parler franchement , une chose dont Berthe se réappro-
visionnait régulièrement , c'était les bouteilles de whisky . Deux , trois par semaine ,
souvent plus , dont les cadavres étaient alignés , en rangs serrés , le long du treillage
séparant la cuisine de l'entrée , comme pour un tir de fête foraine . Trois mouches
vermeilles et merveilleuses bourdonnaient contre son chapeau de paille .
Des cadavres de mouches vermeilles étaient alignés en longs rangs contre le treillage
qui séparait de ses pailles serrées la cuisine de l'entrée . Au tir bourdonnant de la fête ,
on parlait franchement de Berthe qui , chaque semaine , réapprovisionnait deux ou
trois forains en chapeau , souvent plus , en bouteilles de whisky . C'était tout de même
une chose régulière !
Au tir de la fête foraine , Berthe me parla franchement de cette chose merveilleuse :
il y avait tout de même trois cadavres par semaine régulièrement alignés dans l'entrée
de la cuisine . Des mouches vermeilles bourdonnaient contre leurs chapeaux de paille
le long du treillage où , en rangs serrés , ils se réapprovisionnaient séparément en bou-
teilles de whisky , deux , trois , souvent plus !
visionnait régulièrement , c'était les bouteilles de whisky . Deux , trois par semaine ,
souvent plus , dont les cadavres étaient alignés , en rangs serrés , le long du treillage
séparant la cuisine de l'entrée , comme pour un tir de fête foraine . Trois mouches
vermeilles et merveilleuses bourdonnaient contre son chapeau de paille .
Des cadavres de mouches vermeilles étaient alignés en longs rangs contre le treillage
qui séparait de ses pailles serrées la cuisine de l'entrée . Au tir bourdonnant de la fête ,
on parlait franchement de Berthe qui , chaque semaine , réapprovisionnait deux ou
trois forains en chapeau , souvent plus , en bouteilles de whisky . C'était tout de même
une chose régulière !
Au tir de la fête foraine , Berthe me parla franchement de cette chose merveilleuse :
il y avait tout de même trois cadavres par semaine régulièrement alignés dans l'entrée
de la cuisine . Des mouches vermeilles bourdonnaient contre leurs chapeaux de paille
le long du treillage où , en rangs serrés , ils se réapprovisionnaient séparément en bou-
teilles de whisky , deux , trois , souvent plus !
JULES 13 . VIDE ET ÉNERGIE
Chambre de Jules . Soeur Marie de la Sainte Croix est debout sur le seuil .
Elle tient dans la main droite un verre d'eau où pétille un cachet d'aspirine .
- Smdlsc : "Savez-vous , Monsieur Jules , que vous êtes de la poussière d'étoiles ?"
- Jules , de son lit médicalisé : "Moi ?"
- Smdlsc : "Oui , vous … Monsieur Jules …" . Elle s'approche et pose le verre sur
la table de chevet . "… et vous êtes aussi du vide"
- Jules : "Du vide !? … comme vous y allez ! … comment dois-je le prendre ?"
- Smdlsc s'assoit sur le bord du lit : "Si nous disposions d'un microscope très-très-très
puissant …"
- Jules : "Si puissant que ça !"
- Smdlsc : "Ne faites pas l'idiot , Monsieur Jules … imaginons … un microscope pour
observer les atomes … qu'est-ce que nous verrions ? … à votre avis ?"
- Jules : "Euh … je ne sais pas … une petite boule ?"
- Smdlsc : "Que nenni ! … nous ne verrions rien du tout !"
- Jules : "…?… alors , à quoi bon dépenser des sous pour une telle machine ?"
- Smdlsc pose sa main sur l'avant-bras de Jules où goutte à goutte une perfusion :
"Les atomes n'ont pas de structure physique ! … ils sont faits d'énergie …"
- Jules : "Je suis du vide ?"
- Smdlsc : "Vous êtes de l'énergie ! … comme les étoiles !"
- Jules : "Je ne peux pas dire que ça me bouleverse"
- Smdlsc : "Ah ?"
- Jules : "Ma soeur , j'ai une sacrée envie de pisser !"
Elle tient dans la main droite un verre d'eau où pétille un cachet d'aspirine .
- Smdlsc : "Savez-vous , Monsieur Jules , que vous êtes de la poussière d'étoiles ?"
- Jules , de son lit médicalisé : "Moi ?"
- Smdlsc : "Oui , vous … Monsieur Jules …" . Elle s'approche et pose le verre sur
la table de chevet . "… et vous êtes aussi du vide"
- Jules : "Du vide !? … comme vous y allez ! … comment dois-je le prendre ?"
- Smdlsc s'assoit sur le bord du lit : "Si nous disposions d'un microscope très-très-très
puissant …"
- Jules : "Si puissant que ça !"
- Smdlsc : "Ne faites pas l'idiot , Monsieur Jules … imaginons … un microscope pour
observer les atomes … qu'est-ce que nous verrions ? … à votre avis ?"
- Jules : "Euh … je ne sais pas … une petite boule ?"
- Smdlsc : "Que nenni ! … nous ne verrions rien du tout !"
- Jules : "…?… alors , à quoi bon dépenser des sous pour une telle machine ?"
- Smdlsc pose sa main sur l'avant-bras de Jules où goutte à goutte une perfusion :
"Les atomes n'ont pas de structure physique ! … ils sont faits d'énergie …"
- Jules : "Je suis du vide ?"
- Smdlsc : "Vous êtes de l'énergie ! … comme les étoiles !"
- Jules : "Je ne peux pas dire que ça me bouleverse"
- Smdlsc : "Ah ?"
- Jules : "Ma soeur , j'ai une sacrée envie de pisser !"
jeudi 16 avril 2020
KRANT 209 . DEUX VIES
Moments de béatitude … je dors … je ne dors pas tout à fait car des souvenirs
anciens , comme la frange d'une lune , encerclent mes paupières . Maman chante …
sa voix est une caresse ; elle assiège mon berceau de bois léger … quelque chose
fume dans l'ombre devant la forme d'un chat … sur les volets claque un vent confus
de bouleaux … j'ouvre les yeux . Je suis assis dans un fauteuil de toile . Sur mes
jambes allongées , Hume dort . Le fourneau de Monsieur Lee ronronne . L'Océan
Pacifique me berce ...
anciens , comme la frange d'une lune , encerclent mes paupières . Maman chante …
sa voix est une caresse ; elle assiège mon berceau de bois léger … quelque chose
fume dans l'ombre devant la forme d'un chat … sur les volets claque un vent confus
de bouleaux … j'ouvre les yeux . Je suis assis dans un fauteuil de toile . Sur mes
jambes allongées , Hume dort . Le fourneau de Monsieur Lee ronronne . L'Océan
Pacifique me berce ...
mercredi 15 avril 2020
KRANT 208 . HOPETOWN
Aborder à Hopetown n'était pas chose aisée . La manoeuvre était complexe et
requérait toute ma science et celle de l'équipage . Quand enfin le Kritik était lié à
son quai , le capitaine conviait dans sa cabine ses trois officiers , sortait de son coffre
une bouteille de kvas et quatre gobelets d'argent . Monsieur Lee , en tenue de céré-
monie et portant sur l'avant-bras une impeccable serviette blanche , versait l'alcool à
ras-bord des petits récipients puis , nous quatre les tenant sans en perdre une goutte
écoutions le toast que Krant marmonnait à la gloire et en l'honneur de la marine
lettonne . A un imperceptible mouvement de son sourcil droit , nous faisions cul-sec .
Quand les hommes avaient quitté le navire pour boire toute la nuit et mettre sur
leurs genoux les dames de l'endroit , je regardais du pont le quai mélangé de marins
et d'autochtones . Alors , Monsieur Lee s'approchait de moi , perplexe , et lui qui
connaissait les us les plus étranges des plus étranges peuplades , celles de Guinée ,
celles du cercle polaire et comme je l'ai déjà écrit celles des Okakis , et les plus bur-
lesques traditions de tribus pratiquement inconnues , murmurait : "Quelles drôles de
coutumes vous avez ! … hi , hi , hi …"
requérait toute ma science et celle de l'équipage . Quand enfin le Kritik était lié à
son quai , le capitaine conviait dans sa cabine ses trois officiers , sortait de son coffre
une bouteille de kvas et quatre gobelets d'argent . Monsieur Lee , en tenue de céré-
monie et portant sur l'avant-bras une impeccable serviette blanche , versait l'alcool à
ras-bord des petits récipients puis , nous quatre les tenant sans en perdre une goutte
écoutions le toast que Krant marmonnait à la gloire et en l'honneur de la marine
lettonne . A un imperceptible mouvement de son sourcil droit , nous faisions cul-sec .
Quand les hommes avaient quitté le navire pour boire toute la nuit et mettre sur
leurs genoux les dames de l'endroit , je regardais du pont le quai mélangé de marins
et d'autochtones . Alors , Monsieur Lee s'approchait de moi , perplexe , et lui qui
connaissait les us les plus étranges des plus étranges peuplades , celles de Guinée ,
celles du cercle polaire et comme je l'ai déjà écrit celles des Okakis , et les plus bur-
lesques traditions de tribus pratiquement inconnues , murmurait : "Quelles drôles de
coutumes vous avez ! … hi , hi , hi …"
mardi 14 avril 2020
NID DE PIE
Ma chambre était une tour d'observation . Tôt ce matin de mai : j'avais 8 ans ,
déjà il faisait chaud . Vue sur la terrasse mouillée de lumière , le jardin s'ébouriffe et ,
au-delà d'un bosquet , la campagne se gorge de soleil jusqu'à l'autostrade au bourdon-
nement feutré , puis une autre frange de boqueteaux et l'océan enfoui dans une brume
nitescente . Mon père s'assoit sur une chaise de fer au dossier festonné d'un feuillage
blanc taché de rousses corrosions , croise en compas une jambe au-dessus de l'autre et
pose sur sa cuisse un livre . D'ici , de mon nid de pie , je ne puis lire son titre : un de
ses poètes grecs ou une histoire de science-fiction - Asimov , John Wyndham ? - ou
un roman de Chandler ? . Mon père noue ses doigts derrière la nuque , tire ses coudes
en arrière et cambre les reins , comme traversé par une onde libératrice puis , relâché ,
porte sa main droite en visière pour scruter - quoi ? - le lointain radieux où , cet après-
midi , il pourrait sortir son petit voilier , ou la procession poussive des camions sur la
route … il se met à lire . Immobile et soulevant juste ce qu'il faut du store , je regarde
mon père . Les tendons de son cou nerveux , le t-shirt aubergine usé sur ses épaules
sèches , le jean des jours chômés , les sandales dont l'une - celle de la jambe pliée -
est tombée sur le dallage . Vient ma mère , portée par un courant d'air silencieux . Elle
glisse en-dessous de moi , pose sa main aux ongles vermeils contre la joue de mon père
et sur son avant-bras accote sa hanche . Ramages fluides de sa robe . Elle dit quelque
chose . Sans lâcher des yeux sa lecture , il répond . Murmures . J'entends leurs voix
- sourde , celle de ma mère , rêche celle de mon père . Je ne discerne pas les mots .
De là-haut , de mon promontoire , je les vois tous les deux . Ils ont oublié que j'existe
mais c'est moi qui mène la danse .
déjà il faisait chaud . Vue sur la terrasse mouillée de lumière , le jardin s'ébouriffe et ,
au-delà d'un bosquet , la campagne se gorge de soleil jusqu'à l'autostrade au bourdon-
nement feutré , puis une autre frange de boqueteaux et l'océan enfoui dans une brume
nitescente . Mon père s'assoit sur une chaise de fer au dossier festonné d'un feuillage
blanc taché de rousses corrosions , croise en compas une jambe au-dessus de l'autre et
pose sur sa cuisse un livre . D'ici , de mon nid de pie , je ne puis lire son titre : un de
ses poètes grecs ou une histoire de science-fiction - Asimov , John Wyndham ? - ou
un roman de Chandler ? . Mon père noue ses doigts derrière la nuque , tire ses coudes
en arrière et cambre les reins , comme traversé par une onde libératrice puis , relâché ,
porte sa main droite en visière pour scruter - quoi ? - le lointain radieux où , cet après-
midi , il pourrait sortir son petit voilier , ou la procession poussive des camions sur la
route … il se met à lire . Immobile et soulevant juste ce qu'il faut du store , je regarde
mon père . Les tendons de son cou nerveux , le t-shirt aubergine usé sur ses épaules
sèches , le jean des jours chômés , les sandales dont l'une - celle de la jambe pliée -
est tombée sur le dallage . Vient ma mère , portée par un courant d'air silencieux . Elle
glisse en-dessous de moi , pose sa main aux ongles vermeils contre la joue de mon père
et sur son avant-bras accote sa hanche . Ramages fluides de sa robe . Elle dit quelque
chose . Sans lâcher des yeux sa lecture , il répond . Murmures . J'entends leurs voix
- sourde , celle de ma mère , rêche celle de mon père . Je ne discerne pas les mots .
De là-haut , de mon promontoire , je les vois tous les deux . Ils ont oublié que j'existe
mais c'est moi qui mène la danse .
DESMOND 131 . EARTHRISE
Le Président est grincheux . Il est ratatiné dans son fauteuil , les épaulettes de son
veston lui font un oreiller bouchonné sur lequel sa tête est posée comme si un garde
d'Hérode venait de la décoller de son corps . Je suis assis en face de lui .
- "Desmond , vous voyez ce tableau" , dit-il en donnant de la tempe , sur sa droite .
Car , à sa droite , un tableau est accroché près d'une applique de grand style :
"Earthrise" ("Lever de Terre") , photo de la NASA AS-14-2888HR , prise avec
son Hasselblad par Willians Anders , l'un des trois astronautes d'Apollo 8 . Magni-
fique photo dans un cadre en bois .
- Moi : "Oui , Monsieur le Président … magnifique !"
- Lui : "Vous trouvez ?"
Le Président s'extirpe de la profondeur de son fauteuil , se penche et appuie sur
la touche d'appel d'un de ses téléphones . Sonnerie distante . On décroche : "Stacey ?"
(Stacey Anderson est la secrétaire particulière du Secrétaire d'État) … "Ma chère
Stacey , priez Henry de nous retrouver au Bureau Ovale … je suis avec Desmond"
- Le Président , en attendant le Secrétaire d'État , me regarde d'un oeil funèbre .
Il tripote sa cravate : "On va lui demander ce qu'il en pense"
- Kissinger entre : "Bonjour Monsieur le Président … Desmond …"
- Le Président : "Asseyez-vous , Henry" … Kissinger s'assoit à ma gauche .
- "Earthrise" , dit le Président .
- Kissinger , ses deux mains poussant sur les accoudoirs , fait pivoter son buste
vers le tableau : "Earthrise ! … quelle magnifique photographie ! … symbole de
notre savoir-faire … elle illustre aussi que la lune a des libations pendant sa dévo-
lution et que …"
- Le Président : "Henry-Henry ! … épargnez-moi ces considérations astronomiques ,
je n'y comprends rien !"
A ce moment entre Maryline ensachée dans une robe clair-de-lune à couper le souffle .
- Le Président , rasséréné par cette sélénite apparition : Maryline , vous tombez à pic !" .
Tendant le bras vers le lever de terre : "Ce lever de terre , comment le trouvez-vous ?"
- Maryline , toute en courbes sidérantes (sidérales ?) , s'approche de "Earthrise" et ,
comme une comète libérant ses particules neutres : "C'est magnifique !"
- Le Président lisse sa cravate entre l'index et le majeur de sa dextre , puis l'agite :
"Magnifique-splendide-somptueuse photographie !"
- Kissinger et moi nous attendons à une implosion .
- Le Président : "… somptueuse-somptuaire-dispendieuse-onéreuse …"
- Nous : "……………"
- Lui : "… hors de prix !"
- Nous : "……………"
- Lui : "Vous savez ce qu'elle me coûte cette photo ? : 20 millions de dollars !"
- Nous : "……………"
- Lui : "Maryline , vous allez me décrocher ce machin … à sa place , je propose une
aquarelle de Pat . C'est nul et ça ne coûte rien : "Voiliers à Key Biscayne"
veston lui font un oreiller bouchonné sur lequel sa tête est posée comme si un garde
d'Hérode venait de la décoller de son corps . Je suis assis en face de lui .
- "Desmond , vous voyez ce tableau" , dit-il en donnant de la tempe , sur sa droite .
Car , à sa droite , un tableau est accroché près d'une applique de grand style :
"Earthrise" ("Lever de Terre") , photo de la NASA AS-14-2888HR , prise avec
son Hasselblad par Willians Anders , l'un des trois astronautes d'Apollo 8 . Magni-
fique photo dans un cadre en bois .
- Moi : "Oui , Monsieur le Président … magnifique !"
- Lui : "Vous trouvez ?"
Le Président s'extirpe de la profondeur de son fauteuil , se penche et appuie sur
la touche d'appel d'un de ses téléphones . Sonnerie distante . On décroche : "Stacey ?"
(Stacey Anderson est la secrétaire particulière du Secrétaire d'État) … "Ma chère
Stacey , priez Henry de nous retrouver au Bureau Ovale … je suis avec Desmond"
- Le Président , en attendant le Secrétaire d'État , me regarde d'un oeil funèbre .
Il tripote sa cravate : "On va lui demander ce qu'il en pense"
- Kissinger entre : "Bonjour Monsieur le Président … Desmond …"
- Le Président : "Asseyez-vous , Henry" … Kissinger s'assoit à ma gauche .
- "Earthrise" , dit le Président .
- Kissinger , ses deux mains poussant sur les accoudoirs , fait pivoter son buste
vers le tableau : "Earthrise ! … quelle magnifique photographie ! … symbole de
notre savoir-faire … elle illustre aussi que la lune a des libations pendant sa dévo-
lution et que …"
- Le Président : "Henry-Henry ! … épargnez-moi ces considérations astronomiques ,
je n'y comprends rien !"
A ce moment entre Maryline ensachée dans une robe clair-de-lune à couper le souffle .
- Le Président , rasséréné par cette sélénite apparition : Maryline , vous tombez à pic !" .
Tendant le bras vers le lever de terre : "Ce lever de terre , comment le trouvez-vous ?"
- Maryline , toute en courbes sidérantes (sidérales ?) , s'approche de "Earthrise" et ,
comme une comète libérant ses particules neutres : "C'est magnifique !"
- Le Président lisse sa cravate entre l'index et le majeur de sa dextre , puis l'agite :
"Magnifique-splendide-somptueuse photographie !"
- Kissinger et moi nous attendons à une implosion .
- Le Président : "… somptueuse-somptuaire-dispendieuse-onéreuse …"
- Nous : "……………"
- Lui : "… hors de prix !"
- Nous : "……………"
- Lui : "Vous savez ce qu'elle me coûte cette photo ? : 20 millions de dollars !"
- Nous : "……………"
- Lui : "Maryline , vous allez me décrocher ce machin … à sa place , je propose une
aquarelle de Pat . C'est nul et ça ne coûte rien : "Voiliers à Key Biscayne"
lundi 13 avril 2020
KAROLINA
Dans ma vie j'ai eu 3000 femmes .
Mille de moins que Mick Jagger , mais quand même 3000 !
Dans l'ordre numérique , Karolina était au milieu du peloton , vers les 1500 .
J'étais encore à Niort . Mais pour ce qui est de la brièveté de la relation , elle est
largement en tête . En termes de cyclisme, on dirait qu'elle s'est échappée . Notre
liaison a été si brève que je me demande si - par honnêteté comptable - je ne devrais
pas l'exclure de ma liste . J'hésite . Comment était-elle ? . Une blonde , ça j'en suis à
peu près sûr . Allemande . De Dassel en Basse-Saxe (notes sur mon carnet "Femmes") .
Elle ne parlait pas un mot de français . Moi , j'avais fait allemand deuxième langue et
j'avais tout oublié sauf "auf wiedersehen" , ce qui signifie - pour ceux qui l'ignore-
raient (?) - "au revoir" . C'est quand j'ai ouvert la porte de l'appartement que ça s'est
passé . Je précédais Karolina , j'ai jeté mes clés sur le guéridon et j'ai dit "auf wieder-
sehen" . Elle était sur le pas de la porte avec son imperméable sur le dos . Elle m'a pris
au mot . Elle a tourné les talons , la porte de l'ascenseur n'avait pas eu le temps de se
refermer (la fermeture était hyper-lente parce qu'il y avait beaucoup de personnes âgées
dans l'immeuble) et quand je me suis précipité sur le palier , Karolina avait disparu et
j'entendais le sifflement des câbles de la cabine . Non , il faut que je la gomme du
catalogue de mes conquêtes . Je ne me souviens même pas de la couleur de ses yeux !
Mille de moins que Mick Jagger , mais quand même 3000 !
Dans l'ordre numérique , Karolina était au milieu du peloton , vers les 1500 .
J'étais encore à Niort . Mais pour ce qui est de la brièveté de la relation , elle est
largement en tête . En termes de cyclisme, on dirait qu'elle s'est échappée . Notre
liaison a été si brève que je me demande si - par honnêteté comptable - je ne devrais
pas l'exclure de ma liste . J'hésite . Comment était-elle ? . Une blonde , ça j'en suis à
peu près sûr . Allemande . De Dassel en Basse-Saxe (notes sur mon carnet "Femmes") .
Elle ne parlait pas un mot de français . Moi , j'avais fait allemand deuxième langue et
j'avais tout oublié sauf "auf wiedersehen" , ce qui signifie - pour ceux qui l'ignore-
raient (?) - "au revoir" . C'est quand j'ai ouvert la porte de l'appartement que ça s'est
passé . Je précédais Karolina , j'ai jeté mes clés sur le guéridon et j'ai dit "auf wieder-
sehen" . Elle était sur le pas de la porte avec son imperméable sur le dos . Elle m'a pris
au mot . Elle a tourné les talons , la porte de l'ascenseur n'avait pas eu le temps de se
refermer (la fermeture était hyper-lente parce qu'il y avait beaucoup de personnes âgées
dans l'immeuble) et quand je me suis précipité sur le palier , Karolina avait disparu et
j'entendais le sifflement des câbles de la cabine . Non , il faut que je la gomme du
catalogue de mes conquêtes . Je ne me souviens même pas de la couleur de ses yeux !
samedi 11 avril 2020
LES LOUPS-GAROUS 1
Ressuscitons les mots anciens !
Des lycanthropes !? … Luis cartayait son 4x4 Toyota entre deux murs déhiscents
de colchiques qu'embaumait un subtil petrichor car l'orage s'était éloigné . Il mâchouil-
lait un cigare au goût umami . Des lycanthropes , on n'en avait jamais vus ici , pas plus
que des chevaux zains . Or , selon trois touristes tudesques vêtus d'opulentes simarres
zinzolines (ils conféraient avec une gaupe locale et un cicérone sous les palmes d'un
désopilant tallipot) , un lycanthrope smaragdin au sinciput crénelé - peut-être deux ,
peut-être même une horde , allez savoir ! - rôdaillaient à la périphérie de la ville en
tortorant nos rarescents aucubas . Le cicérone corroborait ces potins au vu d'indices
ubérants et mettait sur le compte de coutumélies et vengeances ignées le comportement
obsidional de ces loups-garous . Mais sans doute s'agissait-il d'impavides tamanoirs du
genre tridactyle tâtant de leurs pattes haptiques quelque amusante fourmilière , animaux
placides donc , que cependant d'aucuns chassent pour leurs griffes et la moire de leur
peau . Ainsi pensait Luis quand une coruscation du soleil perça le caligineux entrelacs
de la jungle et la muraille de ses fruits marcescents . La nuit tomba et le ciel céruléen
s'effondra dans les phares de l'auto en irridescentes diaprures . Luis freina : un homme
à la figure vituline et pellucide paupière , portant sur l'épaule une veste contadine aux
franges indiscutablement squalides , se tenait au milieu du chemin . Il s'accota à la por-
tière et parla , mais son raisonnement , tout empreint de cavillations , était bourré de
termes hypocoristiques . Luis s'impatienta de ses prolégomènes d'autant que l'ilote de
femme que chaperonnait ce sylphe , en robe baptismale , anhélait et son haleine
méphitique , par la vitre baissée , créait dans l'habitacle un vortex fétide .
(à suivre …)
Des lycanthropes !? … Luis cartayait son 4x4 Toyota entre deux murs déhiscents
de colchiques qu'embaumait un subtil petrichor car l'orage s'était éloigné . Il mâchouil-
lait un cigare au goût umami . Des lycanthropes , on n'en avait jamais vus ici , pas plus
que des chevaux zains . Or , selon trois touristes tudesques vêtus d'opulentes simarres
zinzolines (ils conféraient avec une gaupe locale et un cicérone sous les palmes d'un
désopilant tallipot) , un lycanthrope smaragdin au sinciput crénelé - peut-être deux ,
peut-être même une horde , allez savoir ! - rôdaillaient à la périphérie de la ville en
tortorant nos rarescents aucubas . Le cicérone corroborait ces potins au vu d'indices
ubérants et mettait sur le compte de coutumélies et vengeances ignées le comportement
obsidional de ces loups-garous . Mais sans doute s'agissait-il d'impavides tamanoirs du
genre tridactyle tâtant de leurs pattes haptiques quelque amusante fourmilière , animaux
placides donc , que cependant d'aucuns chassent pour leurs griffes et la moire de leur
peau . Ainsi pensait Luis quand une coruscation du soleil perça le caligineux entrelacs
de la jungle et la muraille de ses fruits marcescents . La nuit tomba et le ciel céruléen
s'effondra dans les phares de l'auto en irridescentes diaprures . Luis freina : un homme
à la figure vituline et pellucide paupière , portant sur l'épaule une veste contadine aux
franges indiscutablement squalides , se tenait au milieu du chemin . Il s'accota à la por-
tière et parla , mais son raisonnement , tout empreint de cavillations , était bourré de
termes hypocoristiques . Luis s'impatienta de ses prolégomènes d'autant que l'ilote de
femme que chaperonnait ce sylphe , en robe baptismale , anhélait et son haleine
méphitique , par la vitre baissée , créait dans l'habitacle un vortex fétide .
(à suivre …)
vendredi 10 avril 2020
PRINTEMPS !
Sur ton épaule ,
Ô Vénus laiteuse ,
Virevoltent
Sous des nuages de soufre
Les écailles alaires
D'un paon-du-jour .
Les femmes-papillons
Tournicotent
Dans le parfum des fleurs …
C'est le printemps !
Ô Vénus laiteuse ,
Virevoltent
Sous des nuages de soufre
Les écailles alaires
D'un paon-du-jour .
Les femmes-papillons
Tournicotent
Dans le parfum des fleurs …
C'est le printemps !
jeudi 9 avril 2020
KUMA
A Kuma , on a la passion de l'écriture . Qu'un japonais ait la passion de l'écriture
et d'aucuns infèrent qu'il s'exprime dans cette forme poétique strictement codifiée :
le haïku . Or , à Kuma , on ne s'adonne pas à la poésie bien qu'on se plaise à calligra-
phier dans l'art de la tradition , en idéogrammes et , autant qu'il est possible , au pinceau
et à l'encre sur le papier en fibres de mûrier qu'on appelle "washi" . Ce qu'on pratique
ici , c'est la lettre d'amour . Les missives sentimentales que les habitant(e)s de Kuma
adressent à jet continu à leurs bienheureu(ses)x correspondant(e)s ont la forme de leur
ville , de leurs maisons et de leur campagne . Les émois qu'elles transportent - car il s'agit
de transports et de transports amoureux - ont la limpidité du Kuma-Gawa qui traverse la
cité dont les rizières gravées en camaïeu géométrique de vert- émeraude , jade et olive -
de jaune safran ou jaune paille , démêlent les subtiles passions . Pour les démonstrations
fougueuses , à ces légèretés pastel , l'épistolier de Kuma préférera sans nul doute épreindre
sa concupiscence avec les mots du Pin-Matsu ou du Cèdre-Sugi ! . Écrire , écrire , écrire
encore l'amour ! . Hommes et femmes , vieillards et enfants , s'adonnent au courrier du
coeur entre les cloisons opalescentes de leurs chambres , aussi - modernité oblige - dans
les cages en béton des nouveaux quartiers , mais qu'importe , chaque jour , du bureau de
poste , par train , par avion , des lettres timbrées imprégnées du miel de Kuma essaiment
alentours et plus loin encore ...
et d'aucuns infèrent qu'il s'exprime dans cette forme poétique strictement codifiée :
le haïku . Or , à Kuma , on ne s'adonne pas à la poésie bien qu'on se plaise à calligra-
phier dans l'art de la tradition , en idéogrammes et , autant qu'il est possible , au pinceau
et à l'encre sur le papier en fibres de mûrier qu'on appelle "washi" . Ce qu'on pratique
ici , c'est la lettre d'amour . Les missives sentimentales que les habitant(e)s de Kuma
adressent à jet continu à leurs bienheureu(ses)x correspondant(e)s ont la forme de leur
ville , de leurs maisons et de leur campagne . Les émois qu'elles transportent - car il s'agit
de transports et de transports amoureux - ont la limpidité du Kuma-Gawa qui traverse la
cité dont les rizières gravées en camaïeu géométrique de vert- émeraude , jade et olive -
de jaune safran ou jaune paille , démêlent les subtiles passions . Pour les démonstrations
fougueuses , à ces légèretés pastel , l'épistolier de Kuma préférera sans nul doute épreindre
sa concupiscence avec les mots du Pin-Matsu ou du Cèdre-Sugi ! . Écrire , écrire , écrire
encore l'amour ! . Hommes et femmes , vieillards et enfants , s'adonnent au courrier du
coeur entre les cloisons opalescentes de leurs chambres , aussi - modernité oblige - dans
les cages en béton des nouveaux quartiers , mais qu'importe , chaque jour , du bureau de
poste , par train , par avion , des lettres timbrées imprégnées du miel de Kuma essaiment
alentours et plus loin encore ...
mercredi 8 avril 2020
LE SOLDAT FERRARI 4
Quand on va de Sulmona à Campo di Giove par un sentier tordu , on arrive
obligatoirement à Canzano . C'est le seul passage entre les deux vallées . Le village ,
situé au confluent de l'Orfeuto dans l'Orta , s'élève sur un éperon rocheux . Au XIVe
siècle , les barons Baglioni érigèrent l'église du Santissimo Salvatore sur le site de
l'antique Corfinium . Je suppose , chère lectrice et cher lecteur , que ces considérations
historico-géographiques , malgré l'affection que vous me portez , ont rejoint votre
corbeille à papier . Vous avez tort . On ne comprendra pas l'extraordinaire personnalité
du Soldat Ferrari - Fortunato Ferrari ! - si on ne sait rien de son environnement et
- chers lecteurs - heureusement que vous m'avez !
Dans quel paradis infernal naquit Fortunato , je le découvre quelques heures avant
vous , au hasard d'un voyage fantasmatique , comme si j'allais d'un neurone à l'autre ou
d'une île déserte à un continent oublié , tandis que je monte à Canzano à l'heure la plus
chaude entre les épilobes et le lys martagon .
Lecteurs , nous avons de la chance : l'orchidée nigritelle ne pousse plus sur ces
pentes et nous épargne ses nauséabondes senteurs ...
obligatoirement à Canzano . C'est le seul passage entre les deux vallées . Le village ,
situé au confluent de l'Orfeuto dans l'Orta , s'élève sur un éperon rocheux . Au XIVe
siècle , les barons Baglioni érigèrent l'église du Santissimo Salvatore sur le site de
l'antique Corfinium . Je suppose , chère lectrice et cher lecteur , que ces considérations
historico-géographiques , malgré l'affection que vous me portez , ont rejoint votre
corbeille à papier . Vous avez tort . On ne comprendra pas l'extraordinaire personnalité
du Soldat Ferrari - Fortunato Ferrari ! - si on ne sait rien de son environnement et
- chers lecteurs - heureusement que vous m'avez !
Dans quel paradis infernal naquit Fortunato , je le découvre quelques heures avant
vous , au hasard d'un voyage fantasmatique , comme si j'allais d'un neurone à l'autre ou
d'une île déserte à un continent oublié , tandis que je monte à Canzano à l'heure la plus
chaude entre les épilobes et le lys martagon .
Lecteurs , nous avons de la chance : l'orchidée nigritelle ne pousse plus sur ces
pentes et nous épargne ses nauséabondes senteurs ...
mardi 7 avril 2020
COTE 137 . 149 . PARENTHÈSES
Ça fait bien une demi-heure qu'on n'a pas entendu la voix de Martial !
- Le capitaine : "Martial , on ne vous entend plus ..."
- Martial : "……….."
- Moi : "Qu'est-ce qui te prend ? … tu es malade ? … et qu'est-ce que tu fous là , assis
comme ça ?"
- Martial : "……….."
Martial est assis en tailleur sur le caillebotis , à côté de sa chaise bancale , la pipe entre
les dents . Il ne regarde rien . Il cligne peu des yeux .
- Bertin : "Tu veux un café ?"
- Moi : "Tu boudes ?"
- Le capitaine : "Ah , mon bon Martial , j'ai compris : je vous ai privé de patrouille …
et vous avez des fourmis dans les jambes"
- Moi : "Martial , ça suffit ! … parle !"
- Prigent : "Dis quelque chose , n'importe quoi !"
- Moi : "Ce silence , c'est insupportable !"
- Le capitaine : "Vous voulez que j'appelle le Major ?"
- Moi , rigolard : "… ou l'aumônier ?"
Quelques gars nous rejoignent . Nous faisons cercle autour de notre camarade inerte .
- Prigent : "Si tu nous racontais une histoire "
- Riou agite une main devant le visage de Martial : "Tu n'es pas mort au moins ?"
- Prigent , de son index plié , frappe le casque du Bouddha crasseux et mal rasé :
"Toc-toc … il y a quelqu'un là-dedans ?"
- Le capitaine : "Martial , nom de Dieu ! … répondez !"
- Guégen , notre nouveau téléphoniste : "Peut-être qu'il dort …"
- Moi : "Les yeux ouverts ?"
- Mahé s'approche et fend notre cercle : "Si on le chatouillait ?"
A ces derniers mots , les yeux de Martial s'affolent . Sa pipe se met à trembler entre
ses lèvres . Nous sommes atterrés . Puis il se maîtrise et revient à sa contenance initiale :
passive , inexpressive . De guerre lasse , chacun retourne à son inoccupation . Nous
abandonnons Martial sur son caillebotis . Une demi-heure plus tard , Martial d'une voix
forte :
- "Une heure ! … j'ai tenu une heure ! … je n'existais plus , mon capitaine ! … pendant
une heure , j'ai mis entre parenthèses mon désir des sens et mon désir d'existence …
kâmâ-tanhâ et bhava-tanhâ"
- Le capitaine : "…..?….. qu'est-ce que c'est que ce charabia ?"
- Le capitaine : "Martial , on ne vous entend plus ..."
- Martial : "……….."
- Moi : "Qu'est-ce qui te prend ? … tu es malade ? … et qu'est-ce que tu fous là , assis
comme ça ?"
- Martial : "……….."
Martial est assis en tailleur sur le caillebotis , à côté de sa chaise bancale , la pipe entre
les dents . Il ne regarde rien . Il cligne peu des yeux .
- Bertin : "Tu veux un café ?"
- Moi : "Tu boudes ?"
- Le capitaine : "Ah , mon bon Martial , j'ai compris : je vous ai privé de patrouille …
et vous avez des fourmis dans les jambes"
- Moi : "Martial , ça suffit ! … parle !"
- Prigent : "Dis quelque chose , n'importe quoi !"
- Moi : "Ce silence , c'est insupportable !"
- Le capitaine : "Vous voulez que j'appelle le Major ?"
- Moi , rigolard : "… ou l'aumônier ?"
Quelques gars nous rejoignent . Nous faisons cercle autour de notre camarade inerte .
- Prigent : "Si tu nous racontais une histoire "
- Riou agite une main devant le visage de Martial : "Tu n'es pas mort au moins ?"
- Prigent , de son index plié , frappe le casque du Bouddha crasseux et mal rasé :
"Toc-toc … il y a quelqu'un là-dedans ?"
- Le capitaine : "Martial , nom de Dieu ! … répondez !"
- Guégen , notre nouveau téléphoniste : "Peut-être qu'il dort …"
- Moi : "Les yeux ouverts ?"
- Mahé s'approche et fend notre cercle : "Si on le chatouillait ?"
A ces derniers mots , les yeux de Martial s'affolent . Sa pipe se met à trembler entre
ses lèvres . Nous sommes atterrés . Puis il se maîtrise et revient à sa contenance initiale :
passive , inexpressive . De guerre lasse , chacun retourne à son inoccupation . Nous
abandonnons Martial sur son caillebotis . Une demi-heure plus tard , Martial d'une voix
forte :
- "Une heure ! … j'ai tenu une heure ! … je n'existais plus , mon capitaine ! … pendant
une heure , j'ai mis entre parenthèses mon désir des sens et mon désir d'existence …
kâmâ-tanhâ et bhava-tanhâ"
- Le capitaine : "…..?….. qu'est-ce que c'est que ce charabia ?"
lundi 6 avril 2020
DENDROPHYLAX FAWCETTII
Grand Cayman . 389 West Bay Road . George Town . Nous sommes assis
dans une Opel Corsa devant l'agence Hertz . Madame Delplanque a décidé de
conduire . Je tripote les boutons du GPS .
- "Où allons-nous ? … qu'est-ce que nous venons chercher ici ?"
- Madame Delplanque met le contact : 'Une orchidée … Dendrophylax Fawcettii ,
mais avant …"
- Moi : "Mais avant ?"
- Elle : "Stahvale House . North Church Street" . Elle met ses lunettes de soleil et
déboîte sans actionner le clignotant .
- Moi : "C'est une adresse ?"
- Elle : "Oui" . Elle me tend un papier : "C'est écrit là-dessus … programmez le GPS ,
s'il vous plaît"
- Moi : "C'est l'adresse d'un guide ? … nous avons besoin d'un guide sur cette petite
île ? … on pouvait s'en passer , non ?"
- Elle : "On n'a pas besoin de guide" . Elle se fait mystérieuse et ajoute : "Bank of
Bermuda Limited"
- Moi : "Une banque ?"
- Elle : "Dendrophylax Fawcettii est une espèce menacée … une orchidée"
- Moi : "Et la banque ?"
- Elle , de sa voix grave : "C'est une autre affaire"
- Nous prenons de la vitesse dans West Bay Road . Je programme l'adresse :
S-T-A-H-V … etc
- Moi : "Une banque ?"
- Elle : "Une banque … nous nous occuperons de Dendrophylax Fawcettii sitôt
après"
- Moi : "Bon sang , expliquez-moi ! … qu'est-ce que nous allons faire dans cette
banque ?"
- Elle soupire : "Dans cette banque , les fleurs sont protégées"
A cette minute , je supputai que Madame Delplanque avait de très-très gros avoirs .
dans une Opel Corsa devant l'agence Hertz . Madame Delplanque a décidé de
conduire . Je tripote les boutons du GPS .
- "Où allons-nous ? … qu'est-ce que nous venons chercher ici ?"
- Madame Delplanque met le contact : 'Une orchidée … Dendrophylax Fawcettii ,
mais avant …"
- Moi : "Mais avant ?"
- Elle : "Stahvale House . North Church Street" . Elle met ses lunettes de soleil et
déboîte sans actionner le clignotant .
- Moi : "C'est une adresse ?"
- Elle : "Oui" . Elle me tend un papier : "C'est écrit là-dessus … programmez le GPS ,
s'il vous plaît"
- Moi : "C'est l'adresse d'un guide ? … nous avons besoin d'un guide sur cette petite
île ? … on pouvait s'en passer , non ?"
- Elle : "On n'a pas besoin de guide" . Elle se fait mystérieuse et ajoute : "Bank of
Bermuda Limited"
- Moi : "Une banque ?"
- Elle : "Dendrophylax Fawcettii est une espèce menacée … une orchidée"
- Moi : "Et la banque ?"
- Elle , de sa voix grave : "C'est une autre affaire"
- Nous prenons de la vitesse dans West Bay Road . Je programme l'adresse :
S-T-A-H-V … etc
- Moi : "Une banque ?"
- Elle : "Une banque … nous nous occuperons de Dendrophylax Fawcettii sitôt
après"
- Moi : "Bon sang , expliquez-moi ! … qu'est-ce que nous allons faire dans cette
banque ?"
- Elle soupire : "Dans cette banque , les fleurs sont protégées"
A cette minute , je supputai que Madame Delplanque avait de très-très gros avoirs .
dimanche 5 avril 2020
AUDIENCE PONTIFICALE 11
Je me présente devant le Saint-Père , le visage tuméfié .
- JP II : "Que t'arrive-t-il , mon fils ?"
- Moi : "Tes hallebardiers , très Saint-Père …"
- JP II : "Mes hallebardiers !? … ils t'ont frappé ?"
- Moi : "Pas qu'un peu ! … ça fait onze fois que je viens … c'est ça qui ne leur
a pas plu … j'ai résisté comme vous le voyez … ils voulaient me virer manu militari"
- JP II : "C'est normal , ce sont des militaires"
- Moi : "Oui , mais quand même ! … j'ai pourtant dit que je venais vous poser des
questions !"
- JP II : "C'est ça qui leur a déplu … moi-même , je déteste les questions"
- Moi : "Pourquoi ?"
- JP II : "Parce que c'est indiscret"
- Moi : "Une question sur la Sainte-Trinité , par exemple ?"
- JP II , levant les bras vers le plafond de la Salle Paul VI (auparavant Salle Nervi) :
"Ben , justement ! … celle-là , c'est la pire !"
- JP II : "Que t'arrive-t-il , mon fils ?"
- Moi : "Tes hallebardiers , très Saint-Père …"
- JP II : "Mes hallebardiers !? … ils t'ont frappé ?"
- Moi : "Pas qu'un peu ! … ça fait onze fois que je viens … c'est ça qui ne leur
a pas plu … j'ai résisté comme vous le voyez … ils voulaient me virer manu militari"
- JP II : "C'est normal , ce sont des militaires"
- Moi : "Oui , mais quand même ! … j'ai pourtant dit que je venais vous poser des
questions !"
- JP II : "C'est ça qui leur a déplu … moi-même , je déteste les questions"
- Moi : "Pourquoi ?"
- JP II : "Parce que c'est indiscret"
- Moi : "Une question sur la Sainte-Trinité , par exemple ?"
- JP II , levant les bras vers le plafond de la Salle Paul VI (auparavant Salle Nervi) :
"Ben , justement ! … celle-là , c'est la pire !"
samedi 4 avril 2020
TROIS MOUCHES 185 . D'APRÈS ADA
Si nous tournons maintenant notre appareil vers un autre groupe un peu à l'écart
sous les festons violets de l'arcade du patio , nous pourrons prendre un plan américain
de Berthe enceinte du jeune maestro , qui porte un chapeau de paille où trois mouches
vermeilles et merveilleuses bourdonnent .
Maintenant , à l'écart du groupe et de Berthe , sous les arcades du patio , un jeune
maestro américain portant un chapeau plan aux pailles festonnées , prenait son appareil
et le tournait vers l'enceinte où trois mouches violettes et une autre vermeille bourdon-
naient un peu .
L'américain avait un plan : porter Berthe un peu enceinte sous les arcades où des
mouches bourdonnaient et la prendre avec son appareil à l'écart du groupe des trois
jeunes maestros qui tournaient maintenant leur chapeau de paille en s'émerveillant des
festons violets et vermeils du patio .
sous les festons violets de l'arcade du patio , nous pourrons prendre un plan américain
de Berthe enceinte du jeune maestro , qui porte un chapeau de paille où trois mouches
vermeilles et merveilleuses bourdonnent .
Maintenant , à l'écart du groupe et de Berthe , sous les arcades du patio , un jeune
maestro américain portant un chapeau plan aux pailles festonnées , prenait son appareil
et le tournait vers l'enceinte où trois mouches violettes et une autre vermeille bourdon-
naient un peu .
L'américain avait un plan : porter Berthe un peu enceinte sous les arcades où des
mouches bourdonnaient et la prendre avec son appareil à l'écart du groupe des trois
jeunes maestros qui tournaient maintenant leur chapeau de paille en s'émerveillant des
festons violets et vermeils du patio .
vendredi 3 avril 2020
KRANT 207 . PARTIR
Je traversais le potager puis , après avoir serré dans mes bras mon père et ma petite
mère , je gagnais la forêt où ce qui restait des nuages de la nuit s'effilochait sur les arbres
en rougeoiements infinis . J'étais encore chez moi . Sur l'échine de nos vaches s'élevaient
avec lenteur des voiles de vapeur et le sac de marin pesait sur mon épaule de destinations
exotiques . Nous irions m'avait dit Toms la veille , à Nantes , à Cadix , et nous longerions
la côte d'Afrique . Je passais par-dessus des fossés où grouillaient la vie de la terre et mes
souvenirs d'enfant ; à chaque bon , la bandoulière me coupait le souffle . Derrière un
dernier rideau de verdure , mon ciel morcelé se révélait immense , bordé par l'ultime
cordon dunaire où des mouettes étincelaient comme la crénelure d'une couronne , celle
de l'océan-roi .
mère , je gagnais la forêt où ce qui restait des nuages de la nuit s'effilochait sur les arbres
en rougeoiements infinis . J'étais encore chez moi . Sur l'échine de nos vaches s'élevaient
avec lenteur des voiles de vapeur et le sac de marin pesait sur mon épaule de destinations
exotiques . Nous irions m'avait dit Toms la veille , à Nantes , à Cadix , et nous longerions
la côte d'Afrique . Je passais par-dessus des fossés où grouillaient la vie de la terre et mes
souvenirs d'enfant ; à chaque bon , la bandoulière me coupait le souffle . Derrière un
dernier rideau de verdure , mon ciel morcelé se révélait immense , bordé par l'ultime
cordon dunaire où des mouettes étincelaient comme la crénelure d'une couronne , celle
de l'océan-roi .
jeudi 2 avril 2020
PARADIS 139 . LOURDES 9
Le lecteur attentif (et un tant soit peu instruit) aura compris que s'annonce ici
(Annonciation de l'Ange Gabriel) un très ennuyeux sermon sur la théorie écono-
mique de la Valeur .
- L'Ange Gabriel reboute ses Ray Ban sur son nez , occultant derechef sa céleste
pupille . Il froufroute des ailes comme font les économistes en préambule de leurs
assommantes conférences : "La haute valeur du miracle . Y tiens-tu ?"
- Dieu : "Bien entendu que j'y tiens ! … c'est avec elle que je subjugue l'humaine
candeur"
- L'AG : "Point trop n'en faut … changer l'eau en vin à Cana (Jean 2.12) , c'est top ,
multiplier les pains (Mt 16.9-11) , c'est pas mal non plus , booster un figuier stérile
(Marc 11.12-14) , marcher sur les eaux du Tibériade , bravo ! … ça suffit pour
impressionner … mais je le répète : point trop n'en faut ! . Limiter l'offre , c'est l'astuce
… limiter l'offre excite la demande et augmente la valeur du bien : le miracle …
c'est biblique !"
- Dieu : "………?……."
- L'AG : "Ça t'en bouche un coin !"
- Dieu : "Euh … quel coin ?"
- L'AG développe : "La médecine moderne a banalisé la guérison . Les salles d'attente
sont pleines à craquer , on fait la queue dans les pharmacies , on se bourre de drogues
… et on guérit à tout va ! . La guérison est désormais un bien anodin … tout le monde
s'en fout !"
- Dieu : "………"
- L'AG enfonce le clou : "Vive la guérison miraculeuse … et vive sa rareté !"
- Dieu : "………"
- L'AG : "… et ça fait marcher le commerce … c'est win-win"
- Dieu : "Win-win ?"
Marcello et Catherine sortent de la Basilique Saint-Marc , l'air sanctifié . Leurs pas
(Catherine sur talons hauts) les mènent à n'en pas douter sous le Pont des Soupirs .
FIN
(Annonciation de l'Ange Gabriel) un très ennuyeux sermon sur la théorie écono-
mique de la Valeur .
- L'Ange Gabriel reboute ses Ray Ban sur son nez , occultant derechef sa céleste
pupille . Il froufroute des ailes comme font les économistes en préambule de leurs
assommantes conférences : "La haute valeur du miracle . Y tiens-tu ?"
- Dieu : "Bien entendu que j'y tiens ! … c'est avec elle que je subjugue l'humaine
candeur"
- L'AG : "Point trop n'en faut … changer l'eau en vin à Cana (Jean 2.12) , c'est top ,
multiplier les pains (Mt 16.9-11) , c'est pas mal non plus , booster un figuier stérile
(Marc 11.12-14) , marcher sur les eaux du Tibériade , bravo ! … ça suffit pour
impressionner … mais je le répète : point trop n'en faut ! . Limiter l'offre , c'est l'astuce
… limiter l'offre excite la demande et augmente la valeur du bien : le miracle …
c'est biblique !"
- Dieu : "………?……."
- L'AG : "Ça t'en bouche un coin !"
- Dieu : "Euh … quel coin ?"
- L'AG développe : "La médecine moderne a banalisé la guérison . Les salles d'attente
sont pleines à craquer , on fait la queue dans les pharmacies , on se bourre de drogues
… et on guérit à tout va ! . La guérison est désormais un bien anodin … tout le monde
s'en fout !"
- Dieu : "………"
- L'AG enfonce le clou : "Vive la guérison miraculeuse … et vive sa rareté !"
- Dieu : "………"
- L'AG : "… et ça fait marcher le commerce … c'est win-win"
- Dieu : "Win-win ?"
Marcello et Catherine sortent de la Basilique Saint-Marc , l'air sanctifié . Leurs pas
(Catherine sur talons hauts) les mènent à n'en pas douter sous le Pont des Soupirs .
FIN
KRANT 206 . UNE PETITE GNÔLE
Je trouvai ce soir-là un Toms morose accoudé au bastingage tribord . Combien de
pensées grandes et petites , sombres ou lumineuses , le bastingage avait-il soutenu ,
de sentiments et de ressentiments et à quoi pouvaient mener nos accoudements sur ce
bout de ferraille qui bordait nos vies et dont la peinture écaillée témoignait ? . C'était
comme sortir de soi pour rentrer aussitôt dans nos peaux étriquées . Qu'allions-nous
regarder au-dessus du bordage où il n'y a à voir qu'une surface grise qui , sur les
mappemondes , a noms de mers et d'océans ? . Nul dans notre équipage - et cela vaut
pour tout équipage - ne fait autre chose , son travail accompli et si le temps le permet ,
que jeter son corps et son oeil grand ouvert mais aveugle contre ce garde-fou , d'y
appuyer son coude et d'offrir aux éléments de l'espace sans bornes son être insignifiant ;
conduite de foncière ironie car un marin ne peut croire sérieusement à son importance .
C'est à peu près en ces mots que Toms me le laissa entendre ce soir-là quand , ma main
posée sur son épaule , je lui demandai si cet atlantique il n'en connaissait pas par-coeur
le visage .
- Lui : "Penses-tu vraiment que je le regarde ?"
- Moi : "…………."
- Lui , jetant son mégot par-dessus bord : "Il n'y a rien à voir"
- Moi : "…………."
- Lui : "Ce que je regarde , le croiras-tu ? … c'est moi"
- Moi : "….. toi ? …"
- Lui : "Ma petite vie … dans ce machin immense …"
- Moi : "…………."
- Lui : "Elle me paraît encore plus petite …"
- Moi : "…………."
- Lui : "Elle est minuscule … elle est ridicule …"
- Moi , tentant de barrer son insidieuse mélancolie : "Tu exagères , Toms !"
- Lui : "… comment , j'exagère !?"
- Moi : "…………."
- Lui : "Remarque bien : cet atlantique est dérisoire … le capitaine le dit : c'est une
goutte d'eau dans l'univers !"
- Moi : "…………."
- Lui : "A quoi tout cela rime-t-il ? … peux-tu me le dire ?"
- Moi : "…………."
- Lui : "Nous nous agitons …"
- Moi : "…………."
- Lui : "C'est idiot …"
- Moi : "Écoute-moi , Toms"
- Lui : "Tu as quelque chose d'intelligent à dire ?"
- Moi : "… non … rentrons … j'ai une petite gnôle réconfortante …"
pensées grandes et petites , sombres ou lumineuses , le bastingage avait-il soutenu ,
de sentiments et de ressentiments et à quoi pouvaient mener nos accoudements sur ce
bout de ferraille qui bordait nos vies et dont la peinture écaillée témoignait ? . C'était
comme sortir de soi pour rentrer aussitôt dans nos peaux étriquées . Qu'allions-nous
regarder au-dessus du bordage où il n'y a à voir qu'une surface grise qui , sur les
mappemondes , a noms de mers et d'océans ? . Nul dans notre équipage - et cela vaut
pour tout équipage - ne fait autre chose , son travail accompli et si le temps le permet ,
que jeter son corps et son oeil grand ouvert mais aveugle contre ce garde-fou , d'y
appuyer son coude et d'offrir aux éléments de l'espace sans bornes son être insignifiant ;
conduite de foncière ironie car un marin ne peut croire sérieusement à son importance .
C'est à peu près en ces mots que Toms me le laissa entendre ce soir-là quand , ma main
posée sur son épaule , je lui demandai si cet atlantique il n'en connaissait pas par-coeur
le visage .
- Lui : "Penses-tu vraiment que je le regarde ?"
- Moi : "…………."
- Lui , jetant son mégot par-dessus bord : "Il n'y a rien à voir"
- Moi : "…………."
- Lui : "Ce que je regarde , le croiras-tu ? … c'est moi"
- Moi : "….. toi ? …"
- Lui : "Ma petite vie … dans ce machin immense …"
- Moi : "…………."
- Lui : "Elle me paraît encore plus petite …"
- Moi : "…………."
- Lui : "Elle est minuscule … elle est ridicule …"
- Moi , tentant de barrer son insidieuse mélancolie : "Tu exagères , Toms !"
- Lui : "… comment , j'exagère !?"
- Moi : "…………."
- Lui : "Remarque bien : cet atlantique est dérisoire … le capitaine le dit : c'est une
goutte d'eau dans l'univers !"
- Moi : "…………."
- Lui : "A quoi tout cela rime-t-il ? … peux-tu me le dire ?"
- Moi : "…………."
- Lui : "Nous nous agitons …"
- Moi : "…………."
- Lui : "C'est idiot …"
- Moi : "Écoute-moi , Toms"
- Lui : "Tu as quelque chose d'intelligent à dire ?"
- Moi : "… non … rentrons … j'ai une petite gnôle réconfortante …"
PARADIS 138 . LOURDES 8
Résumé : l'Ange Gabriel révèle à Dieu le programme philanthropique d'Ève
(certes obombré par les brumes de l'alcool) : production de guérisons miraculeuses
à l'échelle industrielle , choix d'une arme thérapeutique : l'eau et repérage d'un site
approprié : la grotte de Lourdes et sa source . "Venez boire à la fontaine et vous y
laver" , telle sera la prescription de Marie apparaissant à l'innocente Bernadette .
14 ans .
- Dieu : "As-tu lu les oeuvres du Docteur Zigfreud ?"
- L'Ange Gabriel : "Non"
- Dieu : 'La chouette Tengmalm , ça te dit quelque chose ?"
- L'AG : "Rien du tout"
- Dieu : "C'est une sorte de hibou boréal"
- L'AG : "Je l'ignorais"
- Dieu : "Revenons à notre trio de moutons : Ève , Marie , Bernadette"
- L'AG : "Dans cette affaire , il y a un hic"
- Dieu : "Quel hic ? … moi je trouve l'idée d'Ève ad hoc"
- L'AG , saisissant l'une des branches de ses Aviator entre les serres griffues de sa
patte droite et les faisant tournoyer (souvenons-nous de Sean Connery dans "Bons
baisers de Russie") dans l'air de la Sérénissime que humèrent jadis (était-ce au
Moyen-Âge ?) tant et tant de conseillers du Doge : "Je n'ai peut-être pas lu "Tintin
au Congo" , pas lu la Bible (même pas un petit bout !) , pas lu les oeuvres de ton
Docteur Zigtruc , je n'ai jamais entendu parler du hibou boréal …"
- Dieu : "La chouette Tengmalm"
- L'AG : " … mais j'ai lu Smith , Ricardo et Karl Marx"
- Dieu : "……?………"
(à suivre …)
(certes obombré par les brumes de l'alcool) : production de guérisons miraculeuses
à l'échelle industrielle , choix d'une arme thérapeutique : l'eau et repérage d'un site
approprié : la grotte de Lourdes et sa source . "Venez boire à la fontaine et vous y
laver" , telle sera la prescription de Marie apparaissant à l'innocente Bernadette .
14 ans .
- Dieu : "As-tu lu les oeuvres du Docteur Zigfreud ?"
- L'Ange Gabriel : "Non"
- Dieu : 'La chouette Tengmalm , ça te dit quelque chose ?"
- L'AG : "Rien du tout"
- Dieu : "C'est une sorte de hibou boréal"
- L'AG : "Je l'ignorais"
- Dieu : "Revenons à notre trio de moutons : Ève , Marie , Bernadette"
- L'AG : "Dans cette affaire , il y a un hic"
- Dieu : "Quel hic ? … moi je trouve l'idée d'Ève ad hoc"
- L'AG , saisissant l'une des branches de ses Aviator entre les serres griffues de sa
patte droite et les faisant tournoyer (souvenons-nous de Sean Connery dans "Bons
baisers de Russie") dans l'air de la Sérénissime que humèrent jadis (était-ce au
Moyen-Âge ?) tant et tant de conseillers du Doge : "Je n'ai peut-être pas lu "Tintin
au Congo" , pas lu la Bible (même pas un petit bout !) , pas lu les oeuvres de ton
Docteur Zigtruc , je n'ai jamais entendu parler du hibou boréal …"
- Dieu : "La chouette Tengmalm"
- L'AG : " … mais j'ai lu Smith , Ricardo et Karl Marx"
- Dieu : "……?………"
(à suivre …)
mercredi 1 avril 2020
LE CHAMP D'AMOUR
L'amour de ma mère était un champ clos : pas facile d'y entrer . La barrière était
rarement ouverte et , quand elle l'était , il fallait être là . Alors , elle s'agenouillait
devant cette chose de 5 ans et l'entourait de ses bras . Son parfum exhalait le manque-
ment . Elle soupirait , la joue appuyée contre ma poitrine et moi , j'avais le nez dans
son inaccessible chevelure . Puis , très vite , elle m'écartait d'elle et , toujours me
tenant les épaules à bout de bras , elle me secouait doucement . Vérifiait-elle que
j'existais réellement , que le corps qu'elle venait d'étreindre avait , il y a si peu de
temps , logé dans le sien ? . Elle posait sa main à plat sur mon coeur . Moi , raide
comme un piquet et pressé d'en finir avec ce tête à tête incongru que cependant
j'avais éperdument désiré , au-delà de ma mère et de son champ d'amour , au-delà
de la clôture , je lorgnais la plaine semée de fleurs sauvages où , dès le terme de
cette embrassade absurde , j'irais me vautrer et compter , tout au loin , dans la brume
atlantique , les porte-containers .
rarement ouverte et , quand elle l'était , il fallait être là . Alors , elle s'agenouillait
devant cette chose de 5 ans et l'entourait de ses bras . Son parfum exhalait le manque-
ment . Elle soupirait , la joue appuyée contre ma poitrine et moi , j'avais le nez dans
son inaccessible chevelure . Puis , très vite , elle m'écartait d'elle et , toujours me
tenant les épaules à bout de bras , elle me secouait doucement . Vérifiait-elle que
j'existais réellement , que le corps qu'elle venait d'étreindre avait , il y a si peu de
temps , logé dans le sien ? . Elle posait sa main à plat sur mon coeur . Moi , raide
comme un piquet et pressé d'en finir avec ce tête à tête incongru que cependant
j'avais éperdument désiré , au-delà de ma mère et de son champ d'amour , au-delà
de la clôture , je lorgnais la plaine semée de fleurs sauvages où , dès le terme de
cette embrassade absurde , j'irais me vautrer et compter , tout au loin , dans la brume
atlantique , les porte-containers .
DESMOND 130 . INTERROGATOIRE
- "Asseyez-vous , Desmond !"
Convocation du Président dans son bureau privé . Le ton est froid . Je m'assois .
- Le Président me regarde dans les yeux : "Parlons !"
- Moi , comme un imbécile : "Euh , Monsieur le Président … de quoi ?"
- Lui : "De vous"
- Moi : "De moi !?"
- Lui avance le buste et tape du plat de la main sur un dossier posé sur son bureau :
"J'ai là un dossier"
- Moi : "……………."
- Lui : "Votre dossier"
- Mon rythme cardiaque s'accélère : "Mon dossier ?"
- Lui , plaqué à nouveau contre le dossier de son fauteuil , la tête légèrement penchée ,
enfoncée entre ses épaulettes . Il ne me quitte pas des yeux : "Edgar me l'a remis"
- Je rougis : "Monsieur Hoover ?"
- Lui : "Je l'ai lu … je sais tout … vous êtes limpide comme l'onde sauf qu'il y traîne
quelques vilains cailloux …"
- J'ai l'impression que mes cheveux se dressent sur ma tête .
- Les yeux du Président auscultent le sommet de mon crâne : "Je me trompe ? …
il me semble que vos cheveux se dressent sur votre tête … allons , Desmond … parlez !
… déchargez votre conscience"
- Moi : "Mais , Monsieur le Président … de quoi ..."
- Lui avance à nouveau le torse en travers du bureau , pose ses coudes sur le cuir du
plateau et croise les doigts . Son regard me cloue sur mon siège : "Je sais tout , Desmond
… mais avouez !"
- Moi . La sueur coule entre mes omoplates . Je ne sais pas quoi dire .
- Lui , soudain , se rejette en arrière et , des deux mains , il frappe ses accoudoirs .
Contrastant avec ses sourcils patibulaires , un grandiose sourire distend son visage :
"C'est bien , Desmond ! … vous n'avez pas parlé !" . Il se lève , saisit le dossier et me
le tend : "Tenez , Desmond … c'est pour votre incinérateur … si ça vous amuse , vous
pouvez le lire mais c'est très ennuyeux !"
Convocation du Président dans son bureau privé . Le ton est froid . Je m'assois .
- Le Président me regarde dans les yeux : "Parlons !"
- Moi , comme un imbécile : "Euh , Monsieur le Président … de quoi ?"
- Lui : "De vous"
- Moi : "De moi !?"
- Lui avance le buste et tape du plat de la main sur un dossier posé sur son bureau :
"J'ai là un dossier"
- Moi : "……………."
- Lui : "Votre dossier"
- Mon rythme cardiaque s'accélère : "Mon dossier ?"
- Lui , plaqué à nouveau contre le dossier de son fauteuil , la tête légèrement penchée ,
enfoncée entre ses épaulettes . Il ne me quitte pas des yeux : "Edgar me l'a remis"
- Je rougis : "Monsieur Hoover ?"
- Lui : "Je l'ai lu … je sais tout … vous êtes limpide comme l'onde sauf qu'il y traîne
quelques vilains cailloux …"
- J'ai l'impression que mes cheveux se dressent sur ma tête .
- Les yeux du Président auscultent le sommet de mon crâne : "Je me trompe ? …
il me semble que vos cheveux se dressent sur votre tête … allons , Desmond … parlez !
… déchargez votre conscience"
- Moi : "Mais , Monsieur le Président … de quoi ..."
- Lui avance à nouveau le torse en travers du bureau , pose ses coudes sur le cuir du
plateau et croise les doigts . Son regard me cloue sur mon siège : "Je sais tout , Desmond
… mais avouez !"
- Moi . La sueur coule entre mes omoplates . Je ne sais pas quoi dire .
- Lui , soudain , se rejette en arrière et , des deux mains , il frappe ses accoudoirs .
Contrastant avec ses sourcils patibulaires , un grandiose sourire distend son visage :
"C'est bien , Desmond ! … vous n'avez pas parlé !" . Il se lève , saisit le dossier et me
le tend : "Tenez , Desmond … c'est pour votre incinérateur … si ça vous amuse , vous
pouvez le lire mais c'est très ennuyeux !"
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