mercredi 7 mai 2014

KARGASOK

On n'aura pas tort de situer cette ville en Sibérie ; et encore moins de la
situer sur le cours de l'Ob et plus précisément sur sa rive gauche ( les
quartiers anciens ) , là où conflue le Vas'Ugan chargé des eaux grises
et tumultueuses des hautes steppes du Vas'Uganje . Mais quand on aura
sur une carte repéré à la loupe ce point minuscule au milieu de nulle part ,
on n'aura qu'une maigre compréhension de ce qu'est une ville isolée
n'ayant d'autre image que d'elle-même . A Kargasok on est à mille verstes
de ce qui ressemble à autre chose que Kargasok : une mer , une montagne ,
une forêt ou une vraie ville . Quoique , au début du printemps , la débâcle
donne à l'habitant d'ici l'idée de ce qu'est , sinon une mer , au moins une
étendue d'eau satisfaisante , car alors l'Ob charrie d'énormes plaques de
glace qui rabotent les berges et emportent avec elles les buissons de l'an-
cien été ; les eaux envahissent les pâtures basses et c'est tout juste si on
distingue les immeubles des nouveaux faubourgs implantés sur la rive
droite , comme si les modernes occupations de la ville se trouvaient d'un
coup sur l'autre bord d'un détroit . Mises à part les crues de printemps ,
le paysage et sa géologie sont à Kargasok aussi lisse que le papier glacé
de la page d'un atlas .

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